Villes
La ville est en train de disparaître sous nos yeux, laissant désormais place dans toutes les régions du monde à des mégapoles, espaces de type urbain qui ne connaissent pas de centre ou qui ont vidé le centre de sa substance et qui se développent sans règle apparente, consommant l’espace et le régurgitant comme un déchet. Dans ces « villes », corps, comportements, inventions, tout est en reconfiguration permanente. Réalité et simulation y constituent les deux faces d’un seul et unique processus.
Ensemble de lieux dans lesquels les hommes ont commencé à vivre, il y a plus de cinq mille ans, la ville regroupe la plupart des activités humaines : habitat, commerce, industrie, éducation, politique, culture. Développée dans le monde à partir modèle occidental, la ville s’est constituée autour d’un centre. Unité urbaine étendue et fortement peuplée, la ville s’est définie en opposition au village et aux zones naturelles et sauvages ou à celles que l’homme a conquises pour y développer l’agriculture.
Le XXe siècle a vu l’émergence des mégapoles, entités urbaines de plusieurs dizaines de millions d’habitants qui ont accompagné l’explosion démographique que connaît la terre. En 2050 plus des deux tiers des humains vivront dans ces villes « dont le centre est partout et la circonférence nulle part ».
Rem Koolhaas donne le nom de ville générique à ces villes qui ont su se libérer « de l’esclavage du centre » et de la « camisole de force de l’identité ». Dans ces mégapoles qui ont englouti « la » ville, les hommes expérimentent leur sortie des conditions « naturelles » d’existence en faisant à travers cette expansion sans fin l’expérience, peut-être la seule nouvelle, de la redondance, là où jusqu’à présent, ils avaient fait l’expérience de la différenciation.