LaRevue - Arts, cultures et sociétés


LaRevue, n° 50


Éditorial

Des images manipulées servent à manipuler l’opinion. On en parle comme si c’était les seules images qui participent à cette terrifiante imprégnation de nos cerveaux par des ordres et des interdits implicites que nous respectons sans même nous en apercevoir. La télévision, par exemple, est devenue partie intégrante du vécu. Elle n’est plus perçue comme vecteur du contrôle social. Partout, les mots répondent aux images en une boucle à effet retardé. Dans la boucle, la danse continue, ballet de dupes pour consciences qui se croient propres. Quel destin que le nôtre !

Éclectique à souhait, ce Numéro 50 de TK-21 LaRevue permet à nos nouveaux lecteurs de prendre d’un coup d’œil la mesure de nos préoccupations majeures : penser les images aujourd’hui, toutes les images, sous toutes les formes, ne pas négliger la peinture, rester attentif à la création littéraire, garder un œil acéré sur certains aspects de l’actualité.

Jean-Louis Poitevin inaugure une nouvelle série de textes qui entendent constituer un terrain d’analyse des problématiques relatives aux images aujourd’hui. Avec ce titre générique de Logiconochronies, il entend indiquer qu’images et mots constituent le navire de nos croyances dans lequel nous sommes malgré nous embarqués. Nous avons appris à croire à tant de choses que nous ne pensons plus à les interroger. Dans cette première Logiconochronie, il est question de Venise, de la Biennale, mais surtout des liens peu explorés qui unissent pratiques contemporaines et histoire de l’art, expériences actuelles et courants issus des grandes sources souterraines alimentant la pensée.

TK-21 LaRevue participe à son premier événement public, Les Rencontres Parisiennes de Photographie Contemporaine (RPCP) qui se tiennent Esplanade des Invalides. Jonathan Abbou qui en est le directeur artistique nous livre ici les idées qui ont présidé à ses choix.

Avec la présentation de quelques photographies d’Yves Gellie et un entretien du philosophe Jean-Michel Besnier, nous ouvrons une ligne consacrée aux robots en déchirant un peu le voile qui nous aveugle sur ces aspects encore méconnus de l’avenir. De nombreux autres aspects de ces questions seront abordés dans les prochains numéros, en particulier en décryptant le travail d’Yves Gellie.

Virginie Rochetti qui nous a souvent offert de petits films d’animation acides et irrévérencieux est invitée à présenter son travail plastique, dessins et broderies, à travers un film, la présentation de certaines de ses œuvres, et un texte de Jean-Louis Poitevin.

Nous sommes heureux de présenter un premier aspect du travail de Sophie Patry, venue à nous par des contacts relayés par les réseaux sociaux. Ses autoportraits ont une puissance d’évocation qui associe le trouble à l’extase d’une manière radicale.

Mark Brown réalise une œuvre unique, un jardin dans lequel il ne fait pousser que des plantes préhistoriques et dont nous rendrons compte dans un prochain numéro. Aujourd’hui nous présentons ses œuvres plastiques, des tissages minuscules, minutieusement travaillés sur un métier en boîte d’allumettes représentant des scènes de vie quotidienne, de match de rugby, d’une intimité osée.

Jeune photographe à l’œuvre déjà foisonnante, Mathias De Lattre fait son entrée dans TK-21 LaRevue avec une série singulière des portrait de chiens, des lévriers espagnols, dont l’histoire est sidérante, accompagnée d’un texte de Hervé Le Goff.

Cinéaste embarquée dans un travail au long cours sur la mémoire et les objets, Globuline est aussi photographe. Elle a développé un travail de portraits d’amis qui lui permettent de questionner l’une de nos croyances les plus profondes, celle qui nous lie à l’existence supposée de ce que l’on nomme avec tant d’emphase la vérité et que prolonge un texte de Jean-Louis Poitevin.

Attentif à ce qui se passe en Corée, nous ne pouvions manquer de participer à notre manière à cette célébration franco-coréenne qui s’étire de 2015 à 2016. TK-21 LaRevue présente pour la première fois le travail de Bang Hai Ja, une grande dame de la peinture coréenne, à travers une réflexion de Jean-Louis Poitevin. Par son œuvre lumineuse capable d’éveiller en nous le sentiment absolu de l’existence sensible d’intensités cosmiques et pacifiantes, Bang Hai Ja tente de nous réconcilier avec nous-mêmes.

Artiste inventive et débordante d’énergie positive, Isa Sator s’installe dans le paysage artistique parisien avec ses œuvres aux couleurs vives racontant avec légèreté un monde ambigu et complexe.

En marche vers un succès mérité, le jeune artiste Mengzhi Zheng, dont nous avons déjà parlé à plusieurs reprises, revient avec de nouvelles œuvres présentées dans le cadre de la Biennale de Lyon. À partir de gestes improvisés, il propose une traversée mentale et « anomale » de l’espace.

Fabienne Yvert nous embarque dans un monde disparu. À partir d’images trouvées aux puces, elle nous convie à partager le geste meurtrier d’un chasseur d’éléphants et nous entraîne dans des replis peu explorés de notre mémoire sociale.

En cette rentrée, la Galerie White Project présente une « exposition muséale » en noir et blanc, un ensemble d’œuvres parfois historiques qui couvrent plus d’un demi-siècle d’histoire de l’art, introduite par Laurent Boudier. Cela confirme si besoin était la qualité du travail effectué par cette galerie depuis sa création.

Laëtitia Bischoff revient avec deux courts poèmes, méditations libres sur deux images, l’une d’Andrès Serrano, l’autre de Jean-Michel Fauquet, à partir de cette remarque « qu’il est une couleur aux intérieurs photographiques, une encre qui sied à cet espace, un tapis, un revêtement en pixel ou en grain, que chacun déploie, aiguille ».

François Helt poursuit sa série de textes écrits spécialement pour TK-21 LaRevue et qui portent sur les conditions techniques qui président à la monstration des images cinématographiques à travers l’histoire.

Pour ne pas perdre le lien vivant qui unit TK-21 LaRevue à la littérature, nous publions la seconde partie de l’inédit de Werner Lambersy, Lettre à un vieux poète, dont le chant emporte nos certitudes sur les rivages de la Grèce éternelle : « Chante, puis fais silence et salue car, même désertes, il y avait une scène, une salle, et des masques aux balcons qui t’écoutaient sans rien dire… »