LaRevue - Arts, cultures et sociétés


LaRevue, n°63


Éditorial

« Profession : homme politique. Résidence principale : la confusion. Programme : former une communauté avec ceux avec qui il est difficile d’avoir quelque chose en commun. Morale : travailler petit quand on est dépassé par les événements. Passion : être en rapport avec ce qui n’en a pas. Parcours : autorecrutement par perception se transformant en initiative. »
Ces phrases que Peter Sloterdijk a écrites dans son ouvrage Dans le même bateau n’ont rien perdu de leur actualité !
Antonio Porchia lui notait il y a plus d’un demi-siècle : « Parfois je la trouve si grande, la misère, que j’ai peur d’avoir besoin d’elle. » Et aussi : « Je voulais être dans quelque chose pour ne pas être dans tout. » (Voix réunies, p. 53 et 47)

Avec un peu de retard dû à l’intense activité autour de la parution d’OVNI, TK-21 LaRevue présente son numéro 63, encore une fois marqué par une forte tonalité coréenne, à la fois par la présence d’artistes coréens mais aussi par celle de textes d’auteurs français relatifs à la Corée.

Jean-Louis Poitevin en effet publie, aux Éditions L’Atelier des Cahiers, Séoul, Playstation mélancolique, le premier roman inspiré par Séoul à un écrivain francophone. Il donne à lire ici quelques extraits accompagnés de photographies qu’il a réalisées lors de ses séjours en Corée.

Pour clore ces années croisées entre la Corée et la France, la revue Les cahiers de Corée publie deux impressionnants volumes. Nous évoquons aujourd’hui le premier volume intitulé « Vivre ailleurs » à travers la publication de l’article de Valérie Gelézeau. Elle y évoque à la fois sa passion pour la Corée et sa méthode de travail universitaire et parvient ainsi au constat heureux que « finalement, ce n’est pas moi qui étudie la Corée. C’est bien plutôt la Corée qui m’a fabriquée et qui continue à le faire de manière souvent hasardeuse. »

L’artiste coréenne Lee Bul, à laquelle Jean-Louis Poitevin a consacré un ouvrage intitulé Monsters aux Presses du réel paru en 2002, est présente à travers un texte qu’il consacre aux enjeux théoriques que met en œuvre la gigantesque installation que l’artiste a réalisée pour la 20e Biennale de Sydney, « Willing to Be Vulnerable ». Elle semble nous adresser en effet une question importante celle de savoir si, flottant, léger et hors du temps, nous savons où se trouve notre véritable demeure ? Peut-être dans l’air « a-gravitationnel » du rêve dont nous sommes issus.

Découvert en Corée l’été passé, l’artiste Kim Young-Hun expose ses toiles récentes à la Galerie Choï & Lager à Cologne avec l’artiste anglais Shane Bradford. Jean-Louis Poitevin rend compte de cette exposition qui met en scène de manière vivante et instructive la ligne de partage entre conscience historique et conscience post-historique lorsqu’elle traverse le champ de la fabrique des images par la peinture.

Né en Corée Jehsong Baak a vécu la plus grande partie de sa vie aux États-Unis et vit maintenant depuis de nombreuses années, en France. Photographe reconnu mais discret, il publie One last goodbye aux Éditions Wonderlust Press, un nouveau livre dont Jean-Louis Poitevin analyse quelques images en détail. Ces images mettent en scène une force magnétique de basse intensité dont elles nous révèlent l’existence, nous permettant ainsi de comprendre combien exister est un rêve.

Jaewook Lee qui publie chaque mois une chronique dans TK-21 LaRevue met un point final à la présence coréenne dans ce numéro 63. Il y évoque en détail une exposition « The Cut and the Crumb curated by Brittany De Nigris and Adam Milner wich brings together artworks that construct a way of defamiliarizing our general sense of everyday objects ».

Jean-Louis Poitevin poursuit ses réflexions sur l’allégorie et la post-histoire en faisant cette fois un détour par une brève présentation de ce moment « historique » dont Guy Debord peut être présenté comme en étant à lui seul l’incarnation. C’est en effet lui qui a formulé l’exigence que son époque devait faire sienne et à laquelle il fut l’un des rares à répondre, sous la forme de cette injonction a-temporelle : « réalisation de la philosophie ».

Sous la plume d’Éva Prouteau, TK-21 LaRevue, qui fait de la ville un de ses sujets d’analyse, se félicite de pouvoir présenter l’œuvre complexe et ambitieuse de Pierre-Jean Giloux, Invisible Cities. Suspendues entre passé et futur, fiction et réalité, les installations vidéo de Pierre-Jean Giloux sondent un univers aux allures de mirage architectural, vertige sensoriel où le familier côtoie l’étrange, où le documentaire infiltre l’abstraction. Il importe de remarquer ici qu’elles ont été produites par Solang Production Paris Brussels qui accompagne de nombreux artistes dans leur démarche créatrice.

Claudio Gobbi est parvenu au terme d’une aventure passionnante autour des églises arméniennes construites dans le monde. Avec la publication de Arménie villes, chez Hatje Kantz, il nous permet de prendre l’ampleur de sa recherche et de son travail. L’art rejoint l’archive mais une archive vivante qui est un appel à poursuivre l’exploration du réel pour parvenir à la compréhension du monde. TK-21 LaRevue publie l’un des textes de ce livre dû à Sophie Jung, un texte dans lequel il est question de la cathédrale Saint-Jean Baptiste, église arménienne de Paris.

Nicolas Sanhes expose à la Galerie Pierre Alain Challier des sculptures de petites tailles, mais surtout un ensemble de dessins qui éclaire d’un jour nouveau son œuvre désormais inscrite dans le paysage de l’art contemporain français. Un texte de Benoît Decron, conservateur en chef du musée Soulages de Rodez et directeur des musées du Grand-Rodez permet de s’immerger plus avant dans ce travail.

Laëtitia Bischoff propose une brève réflexion sur l’habiter autour de l’œuvre de quelques artistes comme Pierrette Bloch ou Michel-Ange. On peut y lire cette phrase : « Habiter c’est partager son âme avec celle des lieux. »

Ce numéro 63 se termine par la deuxième partie du texte d’Alain Coelho, Voyage à Leipzig dans lequel il évoque cette fois la ville de Weimar dans une approche certes centrée sur les grands noms qui y ont séjourné, mais tout aussi sensuelle comme en témoigne cette phrase : « Bruissements de vie, fruits, légumes, salaisons fortes et musquées, jambons, viandes et poissons, j’ai acheté des fraises de Thuringe, comme un morceau de la sève des lieux, et que j’ai longuement savourées sur ma langue. »

Photo de couverture : Valérie Gelézeau

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Les expositions Dé-Croire continuent tout le mois de novembre

Pol Lujan – Jean-Francis Fernandès
7 novembre au 13 novembre ; Vernissage 8 novembre

Xavier Pinon – Yannick Vigouroux
14 novembre au 20 novembre ; Vernissage 15 novembre

Hervé Bernard – Jean-Guy Lathuilère
21 novembre au 27 novembre ; Vernissage 22 novembre

Olivier Perrot – Virginie Rochetti
28 novembre au 4 décembre ; Vernissage 29 novembre

4 décembre : clôture.

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