samedi 6 août 2016

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Algorithmes et fabrication des images — 1/2

, Hervé Bernard et Jean-Louis Poitevin

L’entretien que nous a accordé Frédéric Guichard, directeur scientifique de DXO, s’ouvre sur une approche des algorithmes, un mode de calcul qui se trouve aujourd’hui au cœur de toutes nos pratiques et en particulier de notre production quotidienne d’images et de leur partage.

Parler des algorithmes et de l’image, c’est finalement décrire l’ensemble des processus et des procédés qui permettent à un appareil de fabriquer des images. Car, et cet entretien le montre avec justesse, l’image photographique, réalisée en particulier avec un téléphone portable, est le résultat d’un ensemble complexe de calculs et en rien une capture de la réalité. C’est la convergence entre des données relevant de champs extrêmement divers (mathématique, propriétés des matériaux, optique, physiologie, biologie, neurologie, etc...) qui permet à un appareil qui n’est lui-même qu’une partie d’un appareil englobant d’autres fonctions de fabriquer des « images ».

Cet entretien répond ainsi de manière sous-jacente, à la question, si vaine mais qui a été et est encore au cœur de polémiques violentes, de la différence entre image numérique et image argentique.

Les images numériques proposées par un téléphone portable en particulier permettent définitivement de balayer l’idéalisme de l’instant décisif. Ce qui fait la photographie doit être distingué de la croyance qu’a parfois encore celui qui a le doigt posé sur le déclencheur d’en être le véritable auteur. En effet, plus nous allons vers une image produite automatiquement, moins l’implication du photographe est importante. Ce qui prime, dans ce cas là, dans la fabrication et donc le résultat, c’est le travail de l’équipe de programmeurs et de techniciens qui a conçu l’appareil photo.

Il en va ainsi du fameux fichier raw, considéré, par analogie, comme le négatif d’une photo numérique. En effet, dans ce fichier le rôle de calculs ayant lieu dans l’appareil en fonction de programmes divers est supposé être nul ou presque.

Mais cela ne rend pas pour autant plus vrai le fichier raw, au sens où on l’entend dans l’approche traditionnelle de l’image photographique depuis sa naissance.

Grâce à des entretiens comme celui-ci, une nouvelle ère s’ouvre dans l’analyse et la compréhension du statut des images. On ne peut plus occulter le fait qu’elles sont, tout comme l’image argentique, de part en part fabriquées. Par un subtil effet de feedback d’arguments incontournables, une révision complète des théories de l’image est possible et l’abandon définitif de certaines d’entre elles passaient et passent encore dans certains « milieux » pour des vérités éternelles, devient enfin envisageable.

L’analyse des images devrait connaître aussi sa nuit du 4 août.