dimanche 30 janvier 2022

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L’esprit de la Peinture !

Peindre avec le cinéma

Bernard Gast

, Bernard Gast et Martial Verdier

Au milieu des années 90 naît la Peinture avec le Cinéma. Ce tournant artistique se produit avec la rencontre d’un collectionneur d’art & galeriste qui met un atelier à ma disposition sur Paris, d’une amie qui m’offre une bobine de film avec laquelle je crée ma première "Matrice" transparente et réalise la première Peinture... avec le Cinéma...

Si ces œuvres évoquent parfois, la Photographie, je choisis de m’en émanciper en inventant le concept esthétique de Peindre-avec-le-Cinéma.
Je continue à créer avec la pellicule en réfléchissant à la question esthétique qui préoccupe beaucoup d’artistes : que créer encore en Peinture alors que tout a été déjà peint ?
Le peintre Nabi et théoricien Maurice Denis rappelle que "la Peinture est surtout une surface plane recouverte de couleurs et de formes en un certain ordre assemblées". On a fini par dire que la toile, les pinceaux,... Bref, que toute la matière qui sert à peindre est de la Peinture. Mais la Peinture, c’est bien plus que sa matière !
C’est cela qui fait dire à Olivier Michelon que mon « œuvre est bien plus picturale qu’une Peinture »
A partir de ce jour, j’approfondis cette idée qu’avec le Cinéma, je peins l’esprit de la Peinture !

Filiation (peinture-photo-cinema)

J’étudie la filiation existant entre Peinture,Photo et Cinéma. Comment les Peintures avec le Cinéma mettent-elles en évidence l’esprit de la Peinture ?
La filiation se joue entre la Mère-Peinture et ses Enfants. La Peinture est la mère, car elle est première historiquement. Ses enfants sont la Photographie qui constitue l’aînée, tandis que le Cinéma figure le fils cadet.
En créant ainsi avec son fils-Cinéma, je donne — je (re)donne — naissance à la mère-Peinture à partir de l’un de ses propres enfants. La famille Renoir représente ma métaphore familiale : le père Pierre-Auguste peint alors que son fils Jean filme et devient cinéaste.
Ma démarche artistique est à l’inverse, car je prends le fils-Cinéma pour revenir à la mère-Peinture. Avec ces films déroulés dans l’atelier, je réalise un jour, que je réponds à la question : que faire encore en Peinture aujourd’hui ?

References aux questions d’art contemporain et... autres

La "Peinture-avec-le-Cinéma" comprend plusieurs approches : l’une formelle (avec des références à l’histoire de l’art) ; une autre thématique ou les deux à la fois.
Je revisite et m’affranchis des courants et différentes périodes de l’Art avec la possibilité de les représenter tous (abstrait, figuratif, etc.)...
J’aborde aussi des thèmes : le temps ("Chronéros") ; les migrations ("I’m a gipsy" ; "Des départs froids comme la lune") ; le racisme et l’intégrisme ("Au pas, comme un cheval docile et discret") ; la violence sexuelle ("Les insoumies", "La lune outragée") ; la violence sociale et politique ("Lâcher tout" ; "Dos l’art" ; "Le sang des autres") ; la guerre ("Le coeur d’Ali" ; "Tout l’hiver entre en lui") ; l’amour, la fraternité, l’universel ("Toute la terre et tous les hommes")...

L’intime et l’universel

Comment dire et peindre ce film intérieur bien sûr, mais également, le film du monde avec ce support de l’imaginaire social ? Travailler avec le Cinéma est loin d’être innocent... Il s’agit d’aller jusqu’à la dimension universelle du Cinéma...

La matière du cinema : "pellicule-peau du cinema du monde"

Le Cinéma représente la "Peau-collective" de notre société mondialisée. J’appelle sa pellicule : la "Pellicule-peau du Cinéma du Monde". Pellicule que je travaille, découpe, gratte, griffe, colle, que j’assemble, construis, que je compose... Pour réaliser une "Matrice" transparente qui devient une image de grand format.

Les "insus" : concentrer l’attention sur l’inapercu

Avec ces "Pellicules-peaux", je révèle autre chose que l’évidence pour découvrir une nouvelle pertinence de l’image. Dans le Cinéma, je trouve ce qui échappe ; c’est- à-dire des "insus", comme des images subliminales : une façon de concentrer l’attention sur l’inaperçu !

Titres et poèmes : jeu des paradoxes

Le titre et le poème associés à chaque image la prolongent. La Peinture avec le Cinéma est vraiment complète avec sa "Matrice", le titre, l’image et le poème. Mais ces mots sont parfois volontairement en opposition ou en distance avec l’image.

L’absence, 2008
122 x 150 cm
L’absence (2008)
Dieu tranquille, comment pourrions-nous t’entendre ? N’y a-t-il rien de vrai dans la forêt du monde ? Nous rêvons tous à des gens de pierre tendre Courant vers le soleil qui rythme les secondes
 
Absence (2008)
How could we hear you, quiet Lord ? Nothing true in the forest of the world ? We all dream of folks of tender stone Running towards the sun beating seconds
La ville a des nuages de nécessités, 2018
130 x 135 cm
The city holds clouds of necessities (2018)
Closed streets, white from torments and fear Where caged faces set traps
For their neighbour who condemns privileges In a mess with eyes misplaced by fury
 
La ville a des nuages de nécessités (2018)
Des rues fermées, blanches de tourments et de peur Où des visages en cages tendent des pièges
A leur prochain qui condamne les privilèges
Dans un désordre aux yeux égarés de fureur
L’Homme Silencieux, 2020, à Pierre Soulages
130 x 179 cm
L’Homme-Silencieux (2020) à Pierre Soulages
De beaux horizons rafraîchissent mon désir Et ce qui reste de sagesse à la blessure
Je veux être le fleuve et le nuage à rire, Une rue de film où se lisent les fissures
 
The silent man (2020) to Pierre Soulages
Beautiful horizons freshen up my desire
And whatever wisdom is left... To injury
I want to be the river and the laughing cloud, A movie street where clefts are read
A l’abri de mon nom, 2017, à Rembrandt
130 x 194 cm
A l’abri de mon nom (2017) à Rembrandt
Sur mon visage où la vie dépose... Soixante ans L’ombre du soir s’agrandit en furtifs remous Tout à coup j’aperçois le crépuscule moins flou De ma voix d’artiste à créer... Le coeur béant
 
In the shelter of my name (2017) to Rembrandt
On my face where life unloads... sixty years
The eve’s shadow grows up in sneaky backwash Suddenly I notice the less blurry twilight
of my artist’s voice to create... The gaping heart
You re afraid, 2008
1,30 x 1,30 m
You’re afraid (2008)
Paralysé d’horreur sous l’étreinte violente
La Parole embrume l’œil brigand des amants Le regard en désordre pense bruyamment La peur nocturne est une défaite indolente
 
You’re afraid (2008)
Frozen with horror under the fierce embrace The Word is clouding the lovers’ rakish eye The messed up gaze thinks raucously
The night fear is a languid defeat
Le baiser, 2004
1,6 x 1,3 m
The kiss (2004) to Gustave Klimt
In her so preciously promising arms I do forget Where the sun is raising its beaming light from
 
Le baiser (2004) Hommage à Gustave Klimt
Dans ses bras si précieux de promesses j’oublie D’où le soleil lève sa radiante lumière
Sous tes yeux, 2004
130 x 200 cm
Sous tes yeux (2004)
Levez la main vers le Ciel qui dévisse le Jour
 
La noirceur contemporaine n’est qu’une ombre On ne m’interdira pas l’ineffable joie
Je m’assieds... Je me tais... J’apaise mes décombres... Jusqu’à la Vie généreuse qui partage ma voix
 
Under your eyes (2004)
Raise the hand towards the Sky that unscrews the Day
 
Today’s darkness is but a shadow
Ineffable joice won’t be banned to me
I sit down... I stay silent... I soothe my ruins... Until the lavish Life that shares my voice
Nu d’aurochs, 1999
0,6 x 1,2 m
Nu d’aurochs (1999)
C’est peint avec plaisir... Etendu... Décoiffé Traité du sublime sous une foule de passions
 
Nude aurochs (1999)
It is painted with pleasure... Extended... Tousled A treaty of sublime under a mob of lust

En tête :

Que vous dire encore, 2019
130 x 174 cm
Que vous dire encore ? (2019)
Une oeuvre sur la fausse information, la désinformation et... La parole vide se craquelle
Il nous regarde les mains nouées par le naufrage Pour vendre l’information commune à la terre Entends frapper son infox pour le suffrage
Sa chanson populaire sur la crise monétaire
 
What else to tell you ? (2019)
A « Painting with Cinema » about fake news, misinformation and... The vacant speech is cracking.
He’s watching us with his hands tied by the wreck To sell the information common to the planet Hear his fake news beating for the vote
His popular song on the currency crisis