Exposition Hassan Khan,

L’exposition « Blind Ambition » réunit pour la première fois dans une institution française un important ensemble d’œuvres anciennes et récentes, ainsi que de nouvelles productions de Hassan Khan, organisées dans des constellations et des remixes inédits. Des remixes tout autant physiques que musicaux : « J’ai été influencé par le rap égyptien qui, avant de devenir l’une des musiques les plus populaires d’Egypte, était trop kitsch et franchement mauvaise ». L’artiste nous emmène alors dans une salle où sont projetées les soirées de la jeunesse égyptienne et l’exposition toute entière est accompagnée d’une chanson de rap « sans fin » créée par l’algorithme. Cet audacieux projet pensé pour le Centre Pompidou, tant il semble mêler de techniques artistiques et de démarches profondément personnelles, met en lumière toute la dimension expérimentale d’une recherche esthétique en continuel déplacement.

Collages et hybridations y entremêlent le grotesque et l’onirique : l’on retrouve des petits cochons peints, perdus dans leur rêve, allégorie surprenante (quoique) de Hassan Khan : le monsieur est gentiment bedonnant, il a la voix douce et la démarche incertaine en se baladant dans son aquarium personnel. Tout autant destiné aux initiés du musée qu’aux passants de la rue, une partie de l’expo est dédiée aux promeneurs et aux promeneuses de la rue Saint Merri, interpellant directement l’espace public qui devient arène du prévisible comme de l’imprévisible.

L’héritage critique de l’abstraction et l’énergie subversive du populaire sont également perceptibles : un algorithme créé par l’artiste produit une conversation en égyptien entre un chien, une femme et une tête d’homme (impossible à imaginer sans y être)

« Je voulais interpeler sur le fait que ces discussions, mêmes très simples, ne se répètent jamais deux fois, c’est cela que je trouve magnifique dans l’art ».

De même, dans sa musique, la filiation de l’avant-garde croise le shaabi, le jazz et le hip-hop. Puisant dans l’observation du quotidien et de son passé, chaque objet déploie une fiction brève et acérée, entre poésie et satire.

Les subtiles métaphores de Hassan Khan tendent un miroir mordant à l’anxiété globalisée de notre temps. De quoi tourner la tête et retourner les rêves de plus d’un.