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Départs de feux — II/IV
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La mémoire
N’a que des coups de vent
Pour affiche
*La mémoireN’a que des coups de ventPour afficheCela est bonIl faudra laisser de la placeAux suivantsL’oubliEst le plus justeDes monuments aux morts*Aigues-Mortes en hiverDans une chambre d’hôtelNous avons fait l’amourPlus tardDans la vaste salle déserteDonnant sur la merDes flamants roses qui ontConnu les couplesClandestinsNous ont rejoints solennelsEt d’un pas prudent*Pars Orphée ne reste pasIls ont des caillouxDans la boucheLorsque tu passesIls crachent sur tes tracesEt te reprochent EurydiceCar c’est ton nomQu’elle crieLorsqu’elle trébucheEt que tu veux la toucher
PoètesIls errent hurlentDans la langue perdueLa langue est une sorteD’averseQui retombeDans la gorge où boireL’absorberEt la recracherAinsi que le coquelicotImpropre aux fleuristes*L’homme est nuLa poésie propose deSe tairePour écouter l’espèceQui disparaît*L’éponge le corailEt la grande barrière de l’œilDes femmesQuelques îlesInconnues sur la carte marineDu navire des hommesTe feront quitter la terre fermeOù vivent les fougères géantes
Le vieux ressort des océansTendu par le vent quiRemonte le fluxL’odeur d’iodeQu’on connait si bien quandOn respireAvec des branchies oubliéesEt qu’on nageParmi les hauts fonds de l’airMe font tremblerPlus que le papier à cigarette*L’incroyable offrandeD’un beau visageDe femmeTout le soleil sur elleL’éternité te foudroieCependant le soirRetour dans la grandeGalerie des glacesIl faudra supporterCet obélisque couchéSur l’horizonDu ciel qui s’effondre*In memoriam Pina Bauschet P. P. PasoliniPoèmeLa main sur l’épauleDu précédantEt tenu de même parLe suivantSaluantDe la main libreSans savoir s’ils vontOu sortentDe la scène publiqueOù ils avancentÀ pas lents cadencésChantantDans la file de cellesEt de ceuxQui se tiennent deboutEt agitentLes bras pour attraperLe vide
Sommeil vespéralComme cette poussièreQui doucement se poseSur les grands crusComme une neige lenteSur un chaosDe choses abandonnéesComme ces lavesQui tombent dans la merLaissant sur l’eauDanser une ponce légèrePaix dans l’encrierPresque vide des plaintes*On n’organise pas la brumeDu poèmeNi la noirceur des ténèbresOù l’haleinePerd aussitôt ses pâleurs deNuage tièdeOn n’épouse pas le mystèreDu rythmeOn n’agite qu’un pur silence*La glace énorme des pôlesFondLa place énorme de l’espaceSe creuseL’infini dépasse la frontièreDe l’objetLe nombre efface l’individuL’hypothèseD’un dieu est une escrime deManchotsUne ruse pour monter sur uneChaise quand montentLes eaux*L’homme est nu quandLa poésie se proposePour écouterCe qui bientôt disparaît
LundiJe tonds la laineSur le dos des étoilesMardiJe peigne l’écumeDes chevaux de merMercrediJe brosse les pompesDu crépusculeJeudiJe repasse à l’amidonLes cols de l’aubeVendrediJe prends la poussièreSur le tapis d’azurSamediJe fais le marché pourLe dimancheQue l’on passera au*Le vieux clébard a malAux dentsNe lui jetez pas de sucreNi des os à rongerS’il penche le cou c’estComme ces pinsParasols au bord de mer*C’était l’usageDans les colombiersDe mon enfanceDe glisserUn œuf de plâtreAu creux du nid videComme aujourd’huiUn satellite dansL’espaceC’était l’usageDe planquer à PâquesDes œufsDécorés dans l’herbeEn ville à la maison onNe peut pasÀ cause des jardinièresQue le pigeon dérange*Un ciel de radis rosesDe navetsMauves et de poireauPâle avecUne branche de céleriDans le panier d’osierDe l’horizonLes angesN’ont pas de sexeMais feront la cuisinePour un soleilQue l’appétit dévoreIls mettrontDes os à moelle avecDu vermicelleD’astres dans la soupeDu crépuscule
Ça fait un momentQue les morts chuchotentEt s’agitent à l’officeAvec des majordomesEt des femmes de serviceQui préparentCouques thé et café pourLes gens d’en hautÇa fait un tempsQue les taupes soulèventLa capote de terreQue les marmottes lèventLe nez et guettentLes parfumsQu’emporte les brouettesDu ventCrocus perce-neige herbeAnonyme ont déjà lancéLes pavés de couleursContre les vitraux de l’air*Le miroir sombre du motNe renvoie plusQue des sons sans paroleLa lumièreUn tas d’huîtres et de nacreBroyéesCela suffit-il pour direJusqu’où est supportable laSouffranceMéningite cérébraleMarigot pour les crocodilesÀ fleur de peauQui attrapentL’antilope venue boire l’eauSaumâtreEt m’apportaitLa douceur nue de ses lèvres*J’ai vuCe que je ne voyais pasC’est beauComme un stade désertUn lac sans ridesJ’ai vuCe que je ne voyais pasQui déjà s’estompeMais c’est beau d’avoirVu et je titubeComme l’abeille devantUne gerbe d’arumsEntre les bras d’une fille
QuelquesTravaux ordinaires deL’astronome :NuméroterLes pierres dans le cielTirerDes plans sur la comèteTenirLe journal des éclipsesEffacerDu tableau la craie desÉtoiles filantesRetendreLa corde des horizonsBrosserLa poussière quantiqueBattreLes tapis des planètes etDu soleilRangerLes anciens trente troisTours longue duréeDes galaxiesOuvrirLe couvercle des pots deConfiture des trous noirsConterFleurette aux hypothèsesImaginerQue l’amour paresse etT’attend dans l’espaceNettoyerLa lentille des télescopesRevoirLes courbes graphiquesDes écransPour savoir si elle t’aimePS :Ne pas crierSi tu te pinces les doigtsDans l’agrafeuse
L’éphémèreT’apporte dans sa duréeDe surprendreL’image rebelle du beauLa tempêteQui aveugle et obscurcitLes lampesL’odeur l’encensLe parfum et l’immondeSont les premières et lesDernières marchesDe l’invisiblePuis l’éphémèreRelève l’énorme drapeauBlanc de la défaite*Je marcheSur les coquilles d’œufsDes dinosauresSur des cimetièresD’avant les déluges et laChute des étoilesSur les osTranquilles de morts sansTombesJe flâne et regardeLe nom des rues en rêvantAux plaines d’épisEt de pâquerettes en fleurs*Le porte-jarretelles de fuméesSur le galbe lisse des cuissesDe l’usine atomiqueLa bave de limaces des longsCourriers sur le puzzleSerein de l’azurLa liberté prise en otage ! ouiMais le danseur flamencoDe l’orage en étéLes zigzags excentriques desLibellules sur la berge
En robe de cérémonieSur des talons aiguillesUn bouquet à la mainLa lumière juste mariéeSortait de la mairieSous les confettis blancsEt les volées de rizDans la rue nous étionsDes milliers à lui tendreLes bras pour marcherEn attendant qu’avanceLe cortège noirDes limousines de pluieQui va emporter la noce*Éloignez-vousDe la bordure du quaiCe train ne prend pasDe voyageursEt le poème passeCadences rouges puisBleues des boggiesQui s’éloignentLa vitesse te souffletteOn ne comprend plusLes haut-parleurs
On écrit dans le noirDiderot rédigeAu lit ses mots douxLes racinesSeules poussent versLe basElles apportentUne gloire éphémèreA l’énigmeDes fleurs d’en haut*Le parfumMonte à l’échelleSans échelonOn écrit surLes hauts fondsDe l’océanOù la marée jouePeuMais l’impensableDouille d’obusDu jourLe cuivre verdiDes naufrages duSoleilLe souffleDu ciel qui verseSon seauLa poussière dansL’œil on l’effaceOn frotte pour nePas avoir l’airDe pleurerPour siPeu d’apocalypse
Le silence d’horloge
Dans l’insomnie
Générale de l’espace
Les pas métronomes
Du vide dans le long
Corridor de l’espoir
Le bruit du chapelet
De bombes
Sur la tombe noircie
Des villes
Les moulins à épices
Des mots
Et le tambour
Des lessives du verbe
Les clepsydres
Marines des baleines
Le son imperceptible
Des phalènes
Après les chrysalides
Et la peur
De tomber des pétales
Illustrations : Détails – Claude Monet.