LaRevue - Arts, cultures et sociétés


LesVœux, n°65


Éditorial

Remonter le temps

Avec cette dernière livraison de 2016, TK-21 LaRevue vous présente ses vœux les plus sincères pour cette année 2017.
Carte de vœux multimédia, ce N° 65 est un numéro spécial, un numéro hors norme, un numéro mémoire, un numéro engagement, un numéro bilan, un numéro qui ouvre avec avidité sur 2017, un numéro sans fard qui donne à voir l’ensemble des activités et seulement celles qui ont été réalisées durant l’année passée et qui présente celles qui seront réalisées par TK-21 LaRevue quand elle prend le visage d’un opérateur culturel à la fois transdisciplinaire et international.

Après plus de cinq ans d’existence en tant que revue, TK-21, qui est aussi une association qui a organisé des séminaires (accessibles dans la rubrique du même nom) et organise encore des ateliers, a choisi de s’impliquer dans des actions plus directement en lien avec ses publics à travers l’organisation d’un programme d’expositions et de rencontres et entend poursuivre ces actions durant l’année qui vient.

Les positions théoriques et certains « choix » esthétiques seront rendus à travers ce voyage dans le temps. Il seront plus aisément repérables et permettront à ceux qui ne nous connaissent pas encore bien de prendre la mesure de notre engagement « du côté des images » !

Nous allons donc partir de l’avenir et des deux prochaines expositions pour remonter lentement le long de l’année écoulée en présentant un certain nombre de documents inédits.

2017 va s’ouvrir par une double collaboration avec la galerie Mamia Bretesché.

Si l’on remonte le temps, il faut donc ici évoquer l’exposition qui aura lieu en Février. On y retrouvera Jean-Guy Lathuilière, Olivier Perrot et Martial Verdier pour une exposition où des images qui oscillent entre confirmation de l’existence des choses et des êtres et tentation de leur effacement, engendrent des formes du type de celles que prend la limite de l’être à l’instant infini de la durée pure.

A vos agendas !
Le 12 Janvier à la galerie Mamia Bretesché aura lieu le vernissage de « Beaucoup de filles et quelques garçons » une exposition ludique et festive d’une quinzaine de personnes où des habitués de TK-21 rencontreront des artistes venant d’autres horizons. Au-delà de l’exposition proprement dite, ce titre évoque l’intérêt que porte TK-21 LaRevue depuis sa création pour le travail des artistes femmes.

Avec Dé-croire, une série de cinq expositions de dix artistes présentés par binômes sur cinq semaines, TK-21 LaRevue a choisi non pas de défendre une ligne esthétique comme le prouve la diversité des œuvres présentées, mais l’état d’esprit qui est le sien. En effet, la revue a été créée pour répondre à un manque criant dans le paysage français, un manque relatif au questionnement sur les images aujourd’hui. Le titre général, Dé-croire insiste avec vigueur sur l’enjeu de la relation entre la puissance expressive des images et l’engagement toujours renouvelé du psychisme humain dans l’activité inlassable de croire. Chacune de ces expositions, au-delà de la présentation du travail de chacun des artistes, visait à donner corps à ce questionnement. Les documents présentés ici montreront aisément que le pari est tenu.

Objet né du désir qui a conduit à l’organisation de ces expositions, qui en est à la fois l’émanation, la démonstration et le prolongement durable, OVNI est une publication papier qui a permis à chacun des dix participants et à quelques autres personnes proches de la revue de déployer sur une double page et le plus souvent en une image une proposition visuelle susceptible de « retourner le regard ». Mais c’est surtout par son organisation d’ensemble que ce numéro absolument unique participe pleinement de cette action de TK-21 LaRevue consistant à faire que l’acte de croire dont l’image est en quelque sorte à la fois la dépositaire et l’actrice, s’expose dans la plénitude de sa dualité native qui n’est pas tant celle de l’absence et de la présence ou de la monstration et de l’occultation que celle de l’éveil d’une attente et de l’accomplissement inachevable de ce qu’elle promet.

TK-21 LaRevue,
cela peut sonner comme le titre d’une BD des temps anciens. Ce fut surtout l’accomplissement d’un travail de longue haleine dans le cadre des années croisées France Corée qui se sont achevées en décembre à Séoul.

Dans ce cadre, entre mi-aout et mi-septembre a eu lieu à l’initiative de la co-commissaire coréenne de ces manifestations qui ont commencé en France au printemps, une série d’expositions qui se sont déroulées à Séoul, à Kwangju et à Masan. Ce projet ambitieux né d’un désir de rendre un hommage lointain à la naissance de DADA à Zurich il y a un siècle, a permis à des artistes français et coréens de proposer des oeuvres vivantes mettant à l’ordre du jour, on pourrait dire enfin, les conditions techniques de la réalisation d’images, celles de la prise de vue et du travail de post-production mais aussi celles qui permettent à des images d’être à la fois fixes et mobiles. Le texte de Sim Eunlog déplie avec justesse ce paradigme.

Ces manifestations coréennes ont aussi permis la présentation au cinéma Rhizome de Masan de vidéos réalisées par la plupart des six artistes participant à ce projet. Ces vidéos sont toutes hantées littéralement ou métaphoriquement par une question, celle de la disparition. Quelque chose manque ou fait défaut dans la constitution même de la réalité à laquelle nous prétendons appartenir. Pourtant ce défaut ou ce manque sont moins des signes ou des preuves d’une faiblesse que la manière dont, en mode poétique, les choses s’offrent à nous. C’est en tout cas ce propos qui a rayonné sur les écrans de Corée cet été.

Point de départ de ces manifestations, puisque tels des saumons nous remontons vers la source, Magiciens du ciel est une exposition qui a eu lieu à Paris à la Ville a des Arts en Mai et qui regroupait les mêmes artistes que ceux qui se sont retrouvés en Corée mais avec des propositions sensiblement différentes. L’enjeu était plus orienté sur le fait de questionner la représentation et de creuser la poche de silence qui hante le visible, un silence à comprendre à la fois comme matrice des formes et source de leur puissance d’expression et qui désigne, ici, la zone sensible d’échange d’intensité dont les formes sont la manifestation visible.

La toute première exposition organisée par TK-21 LaRevue en 2016 a été consacrée à deux artistes italiens Pier Paolo Patti et Ciro Vitale. Leurs œuvres déploient et déplient des questions d’une actualité toujours brûlante, preuve s’il en était, que sans courir après l’actualité, TK-21 LaRevue entend être attentive à ce qui agite le monde politiquement, socialement, artistiquement, étant entendu que précisément le vecteur majeur de cette agitation ce sont bien évidemment les images.

La boucle des activités de TK-21 LaRevue en cette année 2016 est donc bouclée, ce qui n’est pas à entendre uniquement comme un trait d’humour, mais aussi comme un rappel de la puissance d’impact de cette nouvelle « figure de rhétorique médiatique » qu’est devenue la boucle et dont Jacques Derrida a précisé les contours dans son ouvrage Le « concept » du 11 septembre (p. 146) en remarquant que la boucle dit à la fois la compulsion de répétition, la spécularité circulaire et narcissique et le cerce vicieux d’un suicide, trois figures qui, au-delà de la logique inhérente au fonctionnement des médias peuvent apparaître comme un symptôme « d’auto-immunité suicidaire ».

TK-21 LaRevue
entend, à partir d’elles, mais surtout avec et par les images, interroger ce qui fait la complexité de notre monde et nous permettre de voir dans les yeux sans être transformés en pierre, la méduse au visage omniprésent mais teinté d’indécidabilité qui nous fascine et nous cloue sur la croix de nos prétentions vaines et de nos croyances vacillantes.

Photo de couverture : Martial Verdier
* * *
De nombreux problèmes sont signalés par des utilisateurs de Safari. Le mal semblant être profondément ancré chez Apple, nous vous conseillons de lire TK-21 sur Firefox ou Opéra par exemple.