LaRevue - Arts, cultures et sociétés


LaRevue
n°104


Éditorial

Guy Debord dit avoir su très vite quel était son programme, la réalisation de la poésie, de l’art et de la philosophie dans la vie même.
Dans une lettre de 1989 il révèle et la date de sa formulation, au début de septembre 1961, et son énoncé, trouvé lors de l’élaboration des thèses dites de Hambourg, restées non écrites. « Il a été convenu alors, que le plus simple résumé de ces conclusions, riches et complexes, pouvait se ramener à une seule phrase : « L’I.S. doit, maintenant, réaliser la philosophie. » Cette phrase même ne fut pas écrite. Ainsi, la conclusion a été si bien cachée qu’elle est restée jusqu’à présent secrète. » (Correspondance.,T.7, p. 140).

TK-21 LaRevue poursuit, avec ce N° 104, son défrichage de strates de création, de pratiques incidentes, de zones d’action peu ou pas explorées par la plupart des revues d’art. Notre inlassable activité trouve dans la croissance constante de nos lecteurs une confirmation des enjeux dont elle est porteuse.

Penser l’art

À l’occasion d’une donation faite au Centre Pompidou, une exposition permet de découvrir le travail de Christian Jaccard, un artiste singulier longtemps associé au mouvement Supports-Surfaces, quoiqu’il n’en fit jamais partie. Christian Jaccard a en effet déployé une pratique aux multiples facettes qui s’est portée essentiellement sur deux éléments, le nœud et le feu. Il s’en explique magistralement dans un entretien vidéo, réalisé et monté par Hervé Bernard et accompagné d’un texte de Jean-Louis Poitevin.

Homme de science et de pensée, Marc-Williams Debono nous propose une déambulation au travers de cinq pièces poétiques qui, chacune à sa mesure, nous font découvrir la plasticité sous-jacente de la matière, son ubiquité, son antériorité sur nous tous car chacun de nous en est le fruit.

Jean-Louis Poitevin poursuit sa réflexion sur les images aujourd’hui, leurs significations, leur présence dans nos vies. L’enjeu, ici, est, à travers l’histoire humaine, de tenter de suivre les différents aspects qu’ont pu prendre les images afin de mieux comprendre ce qu’il en est de notre situation actuelle. Ce texte s’inscrit à la suite des pages parues dans la Logiconochronie XXXXI. L’enjeu, ici est de comprendre ce qui s’est joué dans la région du Fayoum autour de ces images mettant en scène des portraits de défunts.

Nous poursuivons la publication de l’ouvrage que consacre Pedro Alzuru aux derniers séminaires de Michel Foucault, texte qu’il a écrit directement en français. Dans ce passage il revient sur la célèbre formule qui ornait le temple de Delphes : Connais-toi toi-même, une injonction à laquelle il semble que nous n’ayons guère été capables de répondre !

Quand l’art fait face aux crises qui s’avancent

Les Wafers sont un groupe d’artistes internationaux, vivant et travaillant dans un monde fragilisé. Ils sont plasticiens et utilisent tous les médiums pour parler de ce monde qui va à vau-l’eau. Dans cette série d’expositions, à La Villa des Arts, mi-mars, et aux Rencontres de Malaquais, fin mars, ces artistes veulent être les témoins du basculement du monde et ainsi répondre aux crises environnementales en faisant le pari que la poésie et l’imagination sauveront le monde. Ils mobilisent les énergies tout en cherchant à fédérer ceux qui vont de l’avant.

L’Atelier Blanc et Le Moulin des Arts accueillent Ouvrir la ruche et retenir les abeilles, l’épisode 2 de l’exposition Des Artistes & des Abeilles qui s’est tenue à la Topographie de l’art à Paris en 2018. Ils présentent dix artistes de toutes générations, sensibilisés et concernés par les abeilles. Ils en utilisent les médiums comme la cire et les ailes, et s’intéressent à leur morphologie, leurs danses, et leur manière d’utiliser le pollen. Le vernissage de l’exposition aura lieu le 13 mars à Villefranche-de-Rouergue.

Vivant en France depuis de nombreuses années, Walaa Dakak est un artiste syrien dont la peinture est à la fois ancrée dans un sol perdu et se déployant devant des questions existentielles fortes. Jean-Louis Poitevin accompagne cette exposition, se tenant à la Galerie du Génie de la Bastille, d’un texte mettant en scène cette relation complexe au vécu qui irrigue sa création.

Nous présentons le travail issu de la résidence de l’artiste chinoise Zhao Tianji. Elle a été accueillie par DawanArt à Paris cet hiver. C’est la manière dont elle donne un sens esthétique à ses rencontres et à ses conversations qu’elle nous donne à voir.

« Le tissu est un organe qui se déploie pour singer la montagne et les fleuves et les lits qui la parcourent. Le tissu est un organe qui respire encore, de nouveau, maintenant qu’il s’est défait des mains de l’artiste. » Laëtitia Bischoff nous propose une brève mais intense méditation sur le travail de l’artiste Awena Cozannet, une plongée dans les liens récents entre organes, art et informatique.

PhotographieS

Fidèle à son engagement — être un lieu de réflexion sur les images aujourd’hui, toutes les sortes d’images — TK-21 LaRevue présente, dans ce numéro, le travail de plusieurs photographes. De ce bref panorama de la création actuelle ressort, au-delà de la diversité inévitable des points de vue, quelques interrogations communes nous conduisant à reconsidérer ce qu’il en est du rêve comme ce qu’il en est de notre relation aux lieux et à ceux qui les hantent.

Philippe Bonnery, un parcours singulier entre baseball et photographie : « En 2014, avec des amis nous avons commencé Meetinghouse, un espace artistique et culturel interdisciplinaire à but non lucratif situé au centre-ville de Miami. » C’est une telle pratique de la photographie liée à la boulimie des réseaux sociaux, ces dévoreurs d’images qui nous incitent à les produire, qui est ici mise en scène.

TK-21 LaRevue accueille le travail photographique d’Edith Roux. Pia Viewing, historienne de l’art et commissaire d’expositions, accompagne les images de l’exposition de Rodez d’un texte précis et particulièrement éclairant sur ce travail et on comprend, « en parcourant l’œuvre d’Édith Roux, que ses œuvres témoignent directement du rapport entre l’homme et son environnement ; elles désignent des situations tout en constatant les évolutions politiques ou économiques et leurs impacts sur certaines communautés. »

Dans le cadre de nos échanges avec Corridor Éléphant nous présentons le travail de Thierry Lathoud qui nous propose de mieux comprendre comment fonctionne notre regard et notre imaginaire et ce regard inquiet que nous portons sur la mer et ces plages qui s’imposent comme des frontières naturelles.

Littérature

Nous terminons ce numéro avec le cinquième chapitre de la seconde partie du livre en cours Images d’aurore qu’Alain Coelho publie dans nos colonnes, nous faisant renouer avec la vieille tradition oubliée depuis longtemps du feuilleton. Il nous conduit à un moment-clé de cette anamnèse autour de l’enfance qu’il a passée à Tunis. « Et tandis que Tunis plus loin se fermait pour moi, sur la base militaire d’Al-Aouina où nous habitions à présent, l’aurore avait pris d’autres formes. » C’est là que va se préfigurer une nouvelle période de sa vie, se construire un nouveau regard sur le monde. « Je commençais de m’étendre dans un monde changeant, qui n’était plus Tunis, ni l’Italie de ma mère ni exactement la France de mon père. »

 


Photo de couverture : Philippe Bonnery

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