LaRevue - Arts, cultures et sociétés


LaRevue, n° 48-49


Éditorial

Voici, juste avant la reprise, le numéro double de l’été. Mais de la reprise de quelles hostilités parle-t-on ? Celles entre images et mots ? Celles entre reniements devant l’argent et reconnaissance ? Celles entre l’aveu impossible et l’inutile déni ?
Nulle zone mentale ne semble pouvoir échapper au jugement, cette arme fatale dont nous portons la trace des coups quand nous ne nous précipitons pas pour les porter à notre tour sur ce qui nous entoure, sur ce glaive.
Souvenons-nous du Christ : « Ne croyez pas que je sois venu apporter la paix sur la terre : je ne suis pas venu apporter la paix, mais le glaive. »
Chaque image que nous faisons est un aveu de ce que l’on désespère de la venue imminente du jugement dernier et de ce qu’encore, on l’appelle.

Pour son tardif numéro double d’été, TK-21 LaRevue propose un voyage singulier.

Harry Gruyaert qui fit à lui seul une bonne part de l’actualité photographique parisienne ce printemps nous a accordé un entretien, réalisé par Hervé Bernard et Jean-Louis Poitevin, qui nous permet de faire le point sur sa pratique, sa conception de la photographie et les enjeux majeurs que portent les images aujourd’hui.

Simon Morley, un artiste anglais vivant en Corée et possédant une maison en France où il passe ses vacances nous a livré des analyses pertinentes sur l’art coréen de la seconde moitié du XXe siècle. Ici, c’est de son travail d’artiste qu’il s’agit, une méditation essentielle sur les clichés, les trames mnésiques obsédantes et les possibilités de leur échapper par des jeux de recouvrement et de nomination.

Werner Lambersy, dans un texte absolument inédit, Lettre à un vieux poète, dont nous publions la prem !ère partie, tente de débusquer la puissance du chant qu’abritent les gorges nouées de notre époque malade.

Francesca Capasso est une artiste très active sur la scène italienne. Elle est présentée par Raffaella Barbato qui nous révèle comment ses œuvres travaillent à la fois sur les limites de la perception et les possibilités infinies de transmutation dont notre esprit est capable. Pour cela, elle plonge dans les arcanes de son esprit et fait émerger pour nous des éléments vitaux.

Gala Goebel est une jeune artiste dont les vidéos par leur légèreté efficace et le ton qui les anime, désenclavent les limites de notre moi en jouant sur des apparences faussement narcissiques.

Clémentine Ader, présidente de l’association TK-21, publie un premier texte pour la revue, une approche sensible et documentée de l’installation Acquaalta, réalisée pour le Palais de Tokyo à Paris, par Céleste Boursier Mougenot qui nous invite à un voyage intérieur, sombre et sonore. Rappelons qu’il occupe le pavillon français à la biennale de Venise avec des arbres mobiles qui nous rappellent malgré leur danse incertaine, la malédiction dans Macbeth : « N’aie peur de rien jusqu’au jour où le bois De Birnam marchera vers Dunsinane ».

Jean Pierre Brazs vient de publier un ouvrage aux Éditions HD et nous en présentons un passage, des remarques qui sont au cœur de nos préoccupations sur les conditions poétiques, irrationnelles, fantasmatiques et pourtant si réelles, d’apparitions de mondes inconnus juste au-delà de la limite palpable de l’horizon sous la forme d’îles insaisissables.

Toujours intéressée par le paysage contemporain et son approche particulière par des artistes asiatiques, TK-21 LaRevue présente le travail puissant de Li Donglu visible jusqu’à mi-septembre à la galerie A2Z. Tel un moine en pleine méditation Li Donglu ouvre les yeux, prélève des images rémanentes et les combine à d’autres provenant de l’actualité, les superpose, les entremêle, et crée ainsi ses œuvres énigmatiques comme le note Anthony Phuong.

Avec Photographier les jardins de Claude Monet, le musée de Giverny et les Éditions Filigranes se sont associés pour une exposition et une publication des œuvres de photographes contemporains de renom, Darren Almond, Elger Esser, Henri Foucault, Bernard Plossu, Stephen Shore sur le jardin de Monet, un ensemble d’images d’aujourd’hui qui offrent une plongée aux sources même du rêve, selon Jean-Louis Poitevin.

Fabienne Yvert, elle aussi poursuit un voyage aux sources, la photographie lui permettant de voyager entre rêves et réalités. Nous montrons quelques-unes des 32 vues invisibles pour 31 hallucinations nocturnes (exacerbation - photos et phénomènes) qui entrelacent images et mots au plus près du corps.

Nous retrouvons François Helt qui poursuit son analyse particulièrement pointue des conditions techniques qu’il faut respecter lors de la projection des films. Cette fois, il remonte le temps et nous fait découvrir ce qui prévalait au temps des débuts du cinéma en termes de cadence.

Ce numéro double 48-49 se clôt sur la présentation de la vidéo de la conférence La métaphore au prix du réel : littérature, drogue, ivresse faite par Jean-Louis Poitevin dans le cadre de la journée d’étude de la station 9 du laboratoire espace cerveau de l’IAC de Villeurbanne, le 18 avril 2013 à la Maison rouge – Fondation Antoine de Galbert. Le texte de cette conférence est lisible, ici, dans le numéro 23.