jeudi 24 mai 2012

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Emerentia II

Ursula Kraft

, Ursula Kraft

Suite du numéro 9 voici la fin de la série Emerentia II, ainsi que la suite avec des « images » de la vidéo Kitsune que nous publirons dans un prochain numéro.

Emerentia II (2008-2012)


Emerentia évolue dans différents personnages qui sont déjà présents dans le processus de création. Ces différentes directions restent connectées par leur thématique et les histoires sont tissées comme dans une toile d’araignée.

Ainsi Emerentia a des multiples visages et incarne des figures variées. Elle s’habille de beaucoup de vêtements différents : une fois c’est la cape rouge qui la protège comme une deuxième peau (comme chez « peau d’âne »), une fois le kimono rouge qui lui couvre (avec le masque blanc du renard chez « Kitsune », la femme renard asiatique) ou la robe rouge, qui, délicate comme un coquelicot, nous rappelle la vanité, flottant dans l’eau comme une forme sculpturale qui donne l’impression que le corps a déjà disparu. Ici l’iconographie de la jeune femme noyée fait référence à l’Ophelia de Shakespeare dans Hamlet.

Il s’agit de la présence de la mort, le frère du sommeil Compère la mort, la mort apparente, la mort de conte, le pressentiment de mort, des transformations, des métamorphoses, des états entre deux, des transitions, des mondes de rêve, de la pègre et d’intermondes, des mondes fabuleux des êtres de fable, la transformation de l’homme en animal, des chimères et des personnages féminins.

« Unheimlich », ce que l’on pourrait traduire par une « inquiétante étrangeté » est une expression juste pour ce voisinage entre une peur latente, d’une inquiétude, et le mot « Heim » qui veut dire « le chez soi », « à la maison ».

« Kitsune, la femme renarde » Travail vidéographique – réalisé avec la danseuse suisse-japonaise Heidi Durning à Kyoto, la vidéo montre en cadrage fixe dans un « décor paysage », comme pour une pièce de théâtre, sur trois plans - de plus en plus rapprochés vers la caméra - la danse du renard de la femme en kimono rouge et masque blanc.

Kitsune

"stills" vidéo Kitsune

« Kitsune, la femme renarde », est un être fabuleux asiatique, un des personnages féminins faisant partie de la série “Emerentia II”.

Pour C.G. Jung le conte exprime le processus psychologique de l’inconscient collectif qui relie les différentes cultures. Dans ce sens j’ai mis mes pas dans la continuité des contes européens aux contes asiatiques et j’ai constaté que les soi-disant contes européens, comme par exemple « Cendrillon », existait, avec sa coloration géographique, déjà en Chine au Xe siècle.
Des êtres fabuleux sont des créatures dont l’apparition est formée par la “Phantasie” (imagination) de l’être humain. La transformation homme-animal, le rôle du renard dans les contes japonais, souvent relié à une figure féminine, m’intéressent.

Dans Kitsune la femme-renard devient un être humain, mais elle doit – pour sauver sa famille – accomplir des choses “sur-humaines”. Pour travailler dans les rizières elle doit redevenir renard et puisqu’elle a montré sa vraie nature elle est forcée de quitter ce monde, de laisser homme et enfant derrière elle.

La vidéo Kitsune emploie un autre langage formel qu’Emerentia, en étant image en mouvement et en même temps - avec son cadrage fixe – une sorte de “tableau vivant”.

Le paysage japonais représente comme pour une pièce de théâtre décor et image scénographique . Dans la profondeur sur trois plans c’est seulement la femme-renard qui parcourt l’image avec des mouvements de danse, précis et ralentis. La mimique est réduite par le masque stylisé qui fait penser au théâtre Nô. Au début on voit au loin un petit personnage rouge devant une forêt verte entre les rizières, puis, plus proche on aperçoit clairement le masque blanc, les longs cheveux noir et le kimono rouge, puis dans la dernière apparition très rapprochée elle se tourne hors de l’image. Ce cycle tryptique se répète sans cesse en boucle.

Le mouvement ralenti de la femme-renard et le paysage quasiment “figé”, dans lequel bougent seulement de temps à autre les feuilles des arbres – font référence à une scène onirique, “surnaturelle” et hors du temps.

Voir en ligne : http://ursula.kraft.free.fr