lundi 1er avril 2019

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Inside the museum

CCCOD — Tours

, Christian Globensky et Laurent Buffet

TK-21 LaRevue va présenter au fil des mois le travail photographique que Christian Globensky réalise dans les musées et autres lieux de présentation de l’art.

Il prélève des fragments visuels dans l’ordonnancement général de l’espace de monstration révélant par un travail minutieux et précis des zones, des articulations spatiales et surtout des fantômes de l’histoire de l’art.
Il nous propose en fait une expérience qui se situe à l’extrême limite du champ d’investigation de la phénoménologie qui explora au moyen de l’époché, ce suspens censé nous ouvrir les portes de la perception juste, la possibilité de percevoir et de comprendre que ce que nous regardons est aussi une entité, vivante ou non, qui nous regarde.
Reliant le regard à son objet par une proximité visuelle intense, il renverse notre suffisance en l’exhibant comme confrontée à la source d’un doute à la fois esthétique et existentiel.
En effet, là, dans le white/black cube, ce double de notre conscience esthétique et morale, Christian Globensky traque les ombres des fantômes qui nous hantent. Car au-delà même de la possibilité offerte à « la chose » de nous regarder, c’est l’au-delà comme objet de notre hantise qu’il tente de rendre enfin visible.

JLP

Presque tous les musées du monde partagent une même qualité essentielle : ils sont lumineux. La lumière est l’essence d’un édifice culturel, le point de rencontre des ses différentes composantes. Salles et seuils du dedans et du dehors, ces vides auxquels les architectes vont poser les fondements de leur bâtiment, leur musée. Sans cesse, du début à la fin, de haut en bas, ils reprendront la circulation des vides, retraceront la circulation de la lumière, de cette information pure sans contenu.

Les black box sont les salles obscures des musées. Elles se tournent souvent du côté du cinéma en projetant leurs faisceaux lumineux chargés de contenus. Les salles de projection ont tendance à nous rappeler un peu brusquement que les musées sont des institutions qui ont une propension à édulcorer le contenu politique des œuvres. Mais c’est au contraire parce que le musée se vit dans l’après-coup de l’histoire qu’il est par définition « inactuel », et que l’on peut y pressentir le frémissement d’un futur à venir.

Le Centre de Création Contemporaine Olivier Debré, centre d’art contemporain unique en son genre, puisqu’il a pour vocation de diffuser l’art le plus actuel, tout en accueillant une nouvelle mission : prendre en charge le fonds d’un artiste majeur de l’abstraction, Olivier Debré. Autre particularité du CCCOD : outre la nef, qui sert à présenter de très grandes installations, le centre d’art se compose essentiellement d’une galerie blanche et d’une galerie blanche. Ce qui confère à l’ensemble une curieuse impression de noir et blanc, au sens photographique du terme.

Christian Globensky

CCCOD (Watchtower) Tours, C-print, 60x90cm, 2018Retour ligne automatique

Esthétique des infrastructures

Comme les étoiles mortes qui brillent au firmament durant des millions d’années, la part la plus visible de l’art contemporain consiste en des effets de rayonnement. Ce sont ces effets que captent les photo­graphies de Christian Globensky. L’archi­tecture sophistiquée des galeries et des musées, leurs subtils jeux d’éclairage, le design chic des mobiliers d’exposi­tion s’imposent à l’œil du photographe comme les ultimes refuges de l’expé­rience esthétique. De simples cordons de sécurité peuvent ainsi dialoguer avec les monuments de l’histoire de la sculpture, à moins qu’ils n’en soient les plus vivantes incarnations. La fragmentation des motifs, aux confins de l’abstraction, souligne l’ordre, la quiétude, l’autorité qui sied au sérieux des cultes séculiers. Par le génie de la plastique muséale, un bâtiment saisi à travers une fenêtre semble tout droit surgi d’un tableau impressionniste.

Même la signalétique la plus fonction­nelle paraît soudain concurrencer les canons de la figuration picturale. Les lieux d’exposition s’exposent en relé­guant les œuvres aux rangs de simples prétextes. Le public attroupé autour de peintures surnuméraires, un conférencier, des étudiants au travail témoignent de la vitalité de ces théâtres du prestige. Jusqu’aux canards qui barbotent sur un plan d’eau. Tel apparaît le monde de l’art quand son centre de gravité s’est déplacé des œuvres aux conditions de leur mise en scène. La fin de l’art n’est pas la fin de toute création artistique… et on pourrait ajouter : elle est le seul sujet quelque peu valable dont un artiste puisse encore se saisir. L’art après la fin de l’art ? Un art qui réfléchit les conditions de sa dispa­rition dans le spectacle de la culture.

Laurent Buffet

CCCOD (three corners) Tours, C-print, 60x90cm, 2018

Voir en ligne : CCCOD — Tours

Informations : https://keeptalkingagency.wordpress.com/

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