vendredi 4 août 2023

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HANAMI

Regardez les fleurs

, Catherine Belkhodja

HANAMI est le projet de Jasmine Van Hevel et Annabel Sougné, deux femmes photographes qui ont rassemblé autour d’elles 26 femmes photographes du monde entier pour célébrer la beauté des femmes, de plus de 40 ans.

La Galerie Rachel Hardoin [1] est la première à présenter l’exposition itinérante de 28 femmes photographes rassemblées autour d’un même thème : les femmes mûres. Ce dispositif permet d’éduquer le regard sur le corps des femmes de plus de quarante ans. Des corps nus, sans retouche, parfaits avec leurs imperfections.

La porte de l’exposition est entrouverte. On s’approche. Des voiles de soie légères frémissent sous une brise légère. Une impression de vacances, de légèreté et de plénitude, comme si on jouait à cache-cache parmi des draps tout propres qui sècheraient au soleil. Sur ces voiles transparents, des corps de femmes qui exultent, triomphants. On circule au milieu d’un espace sacré : le lieu de la féminité dans toute sa splendeur. Des ventres ronds, des seins gonflés, des fesses dodues, des corps livrés sans artifice, se livrant là en toute simplicité, sans volonté de séduire. À peine jouent-ils avec les ombres et les lumières. Les femmes se sont livrées aux caprices des photographes en toute confiance. Les unes ont choisi l’intimité d’une chambre. D’autres ont préféré célébrer à la fois le corps et la nature.

Contrer les images de la publicité et de la mode qui poussent les femmes à se modifier et à craindre plutôt qu’à accueillir le vieillissement et la fragilité de leurs corps. Aucun corps ne mérite d’être invisible. Il est indispensable de former les yeux de tous sur ce qui nous attend. explique Rachel Hardoin, la vestale du lieu. L’espérance de vie d’une femme en Europe est d’environ 85 ans. La société actuelle nie plus de la moitié de la vie de nos corps et du plaisir de les habiter. Avec cette exposition, ces photographes souhaitent libérer les femmes d’une hiérarchie des corps où la jeunesse et la sveltesse sont la norme et l’idéal.

Rachel Hardoin donne à sa galerie une dimension sacrée où les femmes se retrouvent volontiers pour échanger autour de leur intimité. Des rencontres, des lectures ou des repas partagés, des débats et des rires aussi.

L’objectif de cette exposition ?

Retirer le « corps objet » en scène, ne montrer que des « corps sujets » et motiver un acte thérapeutique. Le choix des photographes est basé sur une volonté de poésie, de douceur, de joie, de respect et surtout de bienveillance. La nudité est une volonté de non-catégorisation d’appartenance socio-économique. Il s’agit de permettre à chaque femme de s’identifier aux corps exposés et d’offrir à la nouvelle génération la possibilité de se projeter dans un futur heureux.

Chaque photographe a eu la liberté de choisir son propre dispositif.
Ainsi, Candice Cellier a choisi de mettre en scène son sujet. Influencée par les peintures de Caravage, elle aime jouer avec les ombres et les lumières sur fond noir. Son parcours est intéressant : Photographe autodidacte, elle a longtemps gagné sa vie dans la photographie médicale : elle a accumulé des milliers de clichés autour de patients opérés : AVANT, PENDANT, APRÈS. Des sujets naturellement imposés en fonction des aléas des commandes. Elle est heureuse maintenant de choisir ses propres thèmes et travaille longuement ses lumières, comme le font également Marguerite Bornhauser ou Marta Dal Sasso.

Martine Lecroart, Bettina Getten, France Dubois, Nora Houguenade, Jasmine van Hevel ou Anabel Sougné célèbrent leurs modèles en pleine nature : à la mer ou dans la forêt. Maria Baoli est la seule à retravailler ses clichés après tirage, utilisant aussi ses qualités de graphiste. Denise Boomkens montre à quel point une femme peut être belle même si ses charmes outrepassent les standards de la taille idéale. Bénédicte Vanderreydt, plongée dans sa baignoire, s’est photographiée elle-même et fait de son mont de Vénus une réalisation totalement abstraite. Monika Elena joue avec l’ombre des fougères sur une poitrine offerte au soleil.
Isabelle Chapuis présente un corps sans tête qui ressemble à une déesse de la fertilité. Annabelle Chatelle fait surgir de l’ombre une femme qui surgit de l’ombre et montre son dos, ornée d’une superbe tresse.

Ces corps qui se côtoient sur des voiles transparents sont particulièrement émouvants et s’impriment dans nos consciences.

Rachel Hardoin veille sur ce petit monde et rend cette galerie entièrement vivante. Cette grande voyageuse a expérimenté de nombreuses cultures, de l’Éthiopie au Japon, développant ainsi une culture éclectique qui lui permet de s’intéresser à de multiples courants artistiques. Elle est au cœur des pulsations qui font bouger le monde et propose régulièrement des évènements qui rendent la galerie de plus en plus attractive.

Pour la rentrée, elle a déjà prévu d’offrir les murs de sa galerie aux artistes qui rendront hommage aux hommes cette fois-ci.

Notes

[1La galerie Rachel Hardoin a présenté une exposition collective d’artistes femmes sur le thème de l’érotisme en juin 2023

Voir en ligne : http://15martel.com/hanami-regardez...

Juillet 2023
Galerie Rachel Hardouin
15, rue Martel 75010 Paris
4ᵉ étage, interphone « 15martelrachel »
du mardi au samedi de 14 h à 19 h
15martel@15martel.com
http://15martel.com

Chacune de ces femmes, de tous âges, a un cliché sélectionné et imprimé sur un carré de crêpe de soie de format 120 cm x 160 cm.