dimanche 26 juillet 2020

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Coquille Vide

Pol Lujan dans Paris déserté

, Jean-Louis Poitevin et Pol Lujan

Inutile de revenir sur le pourquoi et le comment de cette punition planétaire qui touche les vivants de toute condition !

Inutile de vouloir y voir à tout prix la barrière de protection contre un mal qui étend essentiellement ses réseaux dans les ratiocinations des politiques et des médias et qui touche les cerveaux plus encore que les corps.

Inutile enfin de se retenir de vomir devant le silence qui accompagne ce brouhaha pestilentiel.

Il y avait mieux à faire. Pol Lujan l’a fait.

Dans Paris déserté, il est sorti, il a vu et il a rapporté des images comme toujours chez lui, à la fois presque « drôles » et d’un sérieux à décoiffer les évidences et les certitudes.

Alors oui, personne, il n’y avait personne dans les rues.

Absolument personne ? Absolument !

Ah bon ! Alors ce sont des hallucinations que nous montrent ses images ? Les dupes y croiront.

Car il y avait bien quelques ombres errantes dans ces rues de la mort fantasmée et de la peur enfermée. Des ombres de corps humains que généralement on perçoit mais qu’on ne regarde jamais.

Il y avait, ici ou là, tels des pointillés sur la page redevenue vierge d’une ville sans histoire, des gens, tout simplement des gens. Des gens de peu ! Des gens de « rien » ! Des gens pour lesquels la rue est maison, le trottoir, chambre et le regard des autres ce qui les renvoie à l’oubli dans lequel, habituellement, « on » les cantonne.

Ici, dans ces images de Pol Lujan, rien de tout ça !

Ces images impossibles à réaliser sauf quand le diable s’en mêle, parlent la langue de cet oubli, de ce silence forcé, de ce calme qui ne parvient pas à faire oublier la tempête.

Elles parlent la langue de l’attente infinie et du secret révélé.

Elle sont porteuses d’un humour qui n’est pas qu’involontaire et de la drôlerie de situations qui effacent presque l’imminence d’un drame indéfiniment repoussé.

Elles s’affirment comme des vérités si banales qu’elles débordent d’une forme de joie non cynique, la joie de l’indifférence devenue voile translucide laissant passer une lumière pâle emplie de vérité.

Et puis le bruit est revenu et l’oubli a recouvert de son ombre ce que la peur de mourir inoculée par ordre nous a permis, à tous ici, malgré tout, de voir.