« Pour le moment, je voudrais seulement comprendre comment il se peut que tant d’hommes, tant de bourgs, tant de villes, tant de nations supportent quelquefois un tyran seul qui n’a de puissance que celle qu’ils lui donnent, qui n’a pouvoir de leur nuire qu’autant qu’ils veulent bien l’endurer, et qui ne pourrait leur faire aucun mal s’ils n’aimaient mieux tout souffrir de lui que de le contredire. Chose vraiment étonnante et pourtant si commune qu’il faut plutôt en gémir que s’en ébahir, de voir un million d’hommes misérablement asservis, la tête sous le joug, non qu’ils y soient contraints par une force majeure, mais parce qu’ils sont fascinés et pour ainsi dire ensorcelés par le seul nom d’un, qu’ils ne devraient pas redouter puisqu’il est seul ni aimer puisqu’il est envers eux tous inhumain et cruel. Telle est pourtant la faiblesse des hommes : contraints à l’obéissance, obligés de temporiser, ils ne peuvent pas être toujours les plus forts. Si donc une nation, contrainte par la force des armes, est soumise au pouvoir d’un seul comme la cité d’Athènes le fut à la domination des trente tyrans, il ne faut pas s’étonner qu’elle serve, mais bien le déplorer. Ou plutôt, ne s’en étonner ni ne s’en plaindre, mais supporter le malheur avec patience, et se réserver pour un avenir meilleur.
Étienne de La Boétie (Discours de la servitude volontaire, 1576)
TK-21 LaRevue n’a pu résister aux voix charmantes et cruelles qui appelaient à célébrer le Numéro 69 par un déluge d’images célébrant toutes à leur manière les corps, leurs charmes, leur beauté, leurs devenirs inattendus et l’inévitable provocation à la débauche dont ils sont tous porteurs !
Avant de se jeter dans la gueule du loup, ce Numéro 69 se décline tel un numéro habituel avec des articles et des présentations d’œuvres, des analyses sur des sujets inattendus et des textes inédits, et la suite des entretiens ou des œuvres qui se déclinent en chapitres multiples.
Des Confessions d’une enfant du siècle, le long entretien que nous accordé Jeanne Susplugas, nous publions la deuxième partie, un moment où l’intime et les injonctions sociales trouvent en elle à s’accorder dans le devenir œuvre de la contradiction qu’ils instaurent en chacun de nous.
TK-21 LaRevue trouve enfin une occasion de rendre un hommage appuyé à Charles Dreyfus, artiste au parcours singulier, à l’humour ravageur, ce qui manque le plus en ces temps de misère intellectuelle, et à l’œuvre littéraire et critique — il est spécialiste de Fluxus — tout à fait impressionnante. Il expose en ce moment au Carroi, Musée des Arts et d’Histoire de Chinon (vernissage le 20 mai).
Ici s’ouvrent les portes des abysses qui conduisent des arcanes du corps aux zones sombres du désir, des exhibitions volontaires aux aveux involontaires de la chair, de la découverte de la richesse de la vie dans les plis à la quête des formes que prend le corps lorsqu’il est porté par l’amour. C’est à découvrir des œuvres souvent photographiques, mais aussi dessinées ou sculpturales, que nous vous invitons. Des textes accompagnent ces images, textes des photographes eux-mêmes, car ils savent aussi évoquer leurs œuvres, textes qui témoignent qu’il est possible de comprendre des images comme étant des ouvertures sur des parts inaccomplies de nous-même, textes qui sont d’auteurs connus et que les artistes ont choisis pour accompagner leurs œuvres.
Voici ici la liste de celles, car il y a une majorité de femmes, et ceux qui ont chaleureusement accepté notre proposition de participer à ce numéro spécial dans lequel Éros étend plus ses ailes vers les cieux du désir et du plaisir et des langueurs de la peau que vers les rives noires où loge Thanatos.
L’ordre est le fruit d’une savante réflexion qui aura privilégié des rapprochements finalement très « subjectifs » ! Ce sont les œuvres qui importent et elles sont là, offertes, alanguies, tendues, cachées ou exhibées dans la plus terrible lumière.
Avant de vous plonger dans le corps du sujet, nous vous proposons une chronique de Laetitia Bischoff, ainsi qu’une analyse de Clémentine Ader sur les sons dans les films pornographiques.
Les artistes présents sont : Dahmane,Jonathan Abbou,Hervé Rabot, Hannibal Volkoff, Martial Verdier, Sylvain Paris et Hélène Tyrtoff en tant que collectif Rrose Semoy, Denise Fréchet, Cindy, Isabelle Waternaux, François Sagnes, Alain Nahum, Elizabeth Prouvost, Isabelle Gressier, Hervé Bernard, Hélène Langlois, Maud Veith, Martine Heyner Catois et Milène Guermont.