dimanche 31 mai 2020

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Marc Dubord ne sait pas plus que nous, pourquoi les choses sont ce qu’elles sont ; alors il cherche des fragments de réponses dans les malles de ses souvenirs, dans les greniers de l’Histoire

Il déborde d’idées. Des idées qui le dépassent et qui s’envolent dans les espaces d’irréels. Marc Dubord ne sait pas plus que nous, pourquoi les choses sont ce qu’elles sont ; alors il cherche des fragments de réponses dans les malles de ses souvenirs, dans les greniers de l’Histoire. Petite ou grande histoire, commérages ou confidences, comme une psychanalyse de sa propre fantaisie grimaçante on voit réapparaître sur ses photos la trame de ses cauchemars récurrents.

© Marc Dubord

Dans tous ce fatras de personnages abracadabrantesques composé en amalgame façon Henri Alekan surréaliste ou Jan Saudek sur Photoshop, on ne sait plus s’il s’agit de fêtes païennes ou de Carnaval des Fous. On est dans le Nord sous les nuages, ou dans l’atelier d’un Brueghel l’Ancien qui jouerait avec les tissus en transparence ; on voit du cuir, du skaï ou du velours, mais aussi les estampilles et les papiers peints, un monde fantasque / fantastique.

© Marc Dubord

Marc Dubord agit de façon empirique et méthodique à la fois. Il fait semblant de ne pas faire exprès, comme s’il s’amusait à se tromper de dogme. Il désobéit pour satisfaire un caprice anarchiste autant qu’il s’amuse à faire croire que rien n’est jamais sérieux. Pas plus la Mort que l’Amour, pas plus le Sexe que la Famille, pas plus l’Art que les animaux mythologiques.

© Marc Dubord

Marc Dubord joue avec les anachronismes, les juxtapositions scabreuses, les associations de malfaiteurs ou de bien-pensants. Il contrecolle en transparence le vent et la tempête, la chair et le goupillon, l’innocence et la fausse pudeur.

Quand on regarde les images de Marc Dubord, on se prend à baisser les yeux, parfois gêné par son regard voyeur, à la limite Grand-Guignol. Images captives de faits divers venant d’un entre-monde, rémanences bizarres et dissonances chahutées viennent se faire entendre sur ces photos montées.

Naïf ou décalé, armé d’une lampe de poche et d’une palette graphique, Marc Dubord visite les souterrains de la conscience. Il éclaire l’ombre, ou assombrit les contrastes, depuis ce camp de base qu’il s’est installé pour vivre sur face cachée d’une lune de miel en sucre d’orge.

© Marc Dubord

Quelques fois l’évidence vous saute aux yeux comme un loup-garou en plein jour : Marc Dubord n’est pas un photographe réaliste, c’est un compositeur. Il ne veut rien prouver, rien démontrer, rien révéler, non. Son mystère hiberne dans l’antre de l’être, là où se cache l’anima / animus qui est en nous.

Comme les cartes postales de conscrit ou comme les images pieuses, tantôt kitsch et tantôt matures, tantôt cruels, tantôt grotesques ou hybrides, les portraits qu’il fabrique sont imprégnés d’une angoisse existentielle profonde autant que d’un romantisme populaire façon Halloween.

A sa manière, Marc Dubord raconte des fables en image.

CharlElie Couture / New York 2011.

© Marc Dubord

"Sometimes as delicate as the cobwebs from an Edgar Allan Poe short story, at others as haunting as a William Blake poem, Marc Dubord’s digital photography is like a literary masterpiece, not just a visual artform. Fantastic, macabre, hauntingly beautiful and strikingly transgressive, Marc Dubord’s images represent a comingling of the arts and a feast for the eyes and the imagination."

Claudia Moscovici, art critic