dimanche 30 juin 2013

Accueil > Les rubriques > Cerveau > Vertige et tourbillons

Vertige et tourbillons

{Les Entretiens sur la pluralité des mondes}
et la révolution du point de vue

, Isabelle Mullet

La Marquise :
« voilà l’univers si grand que je m’y perds, je ne sais plus où je suis, je ne suis plus rien » ;
Le philosophe :
« Et moi (…), cela me met à mon aise (…), il me semble que je respire avec plus de liberté » [2]

JPEG

Les Entretiens sur la pluralité des Mondes

Bernard Le Bouyer de Fontenelle

Les Entretiens sur la pluralité des Mondes se présentent au premier abord comme une entreprise de diffusion du cosmos copernicien auprès d’un public non spécialiste. En 1686 en effet, le nouvel univers est reconnu comme une vérité dans les milieux savants, mais la révolution copernicienne n’a pas eu lieu auprès du grand public. Ce que ce texte nous permet de toucher du doigt, c’est un moment fascinant, celui d’un changement radical de référentiel. Qu’est-ce que passer d’un univers fixe et fini et d’une position centrale de la terre, à un univers infini et en mouvement ? Qu’est-ce que cela engage ?

Comme l’écrit Fontenelle dans la préface, il s’agit de présenter les connaissances « de la physique » « d’une manière un peu plus agréable et plus égayée » [3]. Cette « manière agréable » est un dialogue philosophique, poétique et galant entre deux personnages, un philosophe détenteur des connaissances et une Marquise ignorante. Ce dialogue se déroule dans un Parc, au fil de six soirées.
Or, au terme de cette leçon de choses, étrangement, le philosophe refuse de reconnaître au produit du dialogue la qualité d’un savoir. A la Marquise qui s’exclame triomphalement à la fin du cinquième soir : « je suis savante ! », son interlocuteur rétorque : « oui vous l’êtes, (…) avec la commodité de pouvoir ne rien croire de tout ce que je vous ai dit » [4].. De quel type est donc ce savoir, qui relève de la croyance, une croyance qui doit elle-même être choisie ? Et ce qui est présenté comme une « commodité » pourrait bien être une interdiction : on sait ce qui se passe quand la Marquise, n’en faisant qu’à sa tête, veut diffuser à son tour ce qu’elle a appris comme s’il s’agissait d’une vérité. Ainsi que nous l’apprend le 6e soir, tout ce qu’elle retire de cet échange, ce sont des sarcasmes et de l’incompréhension. Plusieurs interprétations ont été proposées pour expliquer les déboires de la Marquise et les mises en garde du philosophe. Peut-être s’expliquent-ils par un souci de prudence, tenant au caractère subversif de la thèse de la pluralité des mondes ; ou encore par une vocation élitiste de la philosophie ; ou peut-être enfin par une éthique de la communication honnête.
Ils s’expliquent surtout par la nature du projet des Entretiens, ou plutôt par la nature de ce qui s’y produit.
Les Entretiens sur la pluralité des mondes ne construisent pas un édifice de pensée – qu’il soit science ou fiction- mais ils orchestrent et constituent une expérience. Et cette expérience peut être décrite comme une révolution du point de vue, aux deux sens du terme. Le point de vue de la Marquise, d’abord statique, à la fois pris dans une configuration fixe et la déterminant, devient dynamique, mobile, engagé comme l’univers dans une « révolution continuelle » [5] ; Et cette mise en mouvement, c’est une révolution au second sens du terme. A la fin du dialogue, dans un sens, rien n’a changé ; la Marquise est toujours dans son parc, observant la voûte bleue jusqu’où va sa vue. Et en même temps tout a changé. Il s’est produit un événement qui, pour être silencieux, n’en est pas moins irréversible. « Oser tourner » [6] : tel est bien l’enjeu des Entretiens.
PNG
Si ce texte s’offre aisément à la lecture, il se dérobe singulièrement à l’analyse. C’est qu’il est lui-même toujours en mouvement, celui d’un auteur qui pense par le milieu. Ainsi dans Les Entretiens la pensée va-t-elle dans deux directions simultanément : d’un côté elle remonte aux fondements, pour explorer méthodiquement nos structures d’intelligibilité ; de l’autre, elle produit des images, du possible et des mondes. Par ailleurs le texte fonctionne toujours à plusieurs niveaux à la fois – par exemple logique et rhétorique, ou physique et moral – et ces niveaux sont superposés tout en étant interdépendants.

Les Entretiens sur la pluralité des mondes diffusent peut-être un savoir scientifique, mais surtout ils fonctionnent comme une machine perspectiviste. Nous tenterons ici de percer le secret de cette machinerie, par la reconstitution d’une scénographie, celle, en trois actes, d’une pédagogie du relatif.
JPEG
D’abord, le texte met en scène et construit l’objet scientifique ; il tente de combler l’écart entre l’espace perceptif et l’espace physique au moyen de procédés rhétoriques et poétiques. Mais ensuite, on découvre que cette tentative de créer une commensurabilité nécessite une mise en perspective des évidences sensibles et des préjugés qui aboutit paradoxalement à la désorientation généralisée. L’homme est incommensurable à l’univers infini ; et l’analogie se révèle être la condition de toute pensée - qu’elle soit scientifique ou poétique - tout en étant impossible à fonder. Enfin, cette aporie est dépassée par un saut dans le relatif, qui devient milieu d’expérimentation ; la pensée y éprouve la pluralité et la mobilité du monde, au gré de la multiplication des points de vue, de la production échevelée d’analogies, et du vertige délicieux des seuils.

Les Entretiens sur la pluralité des Mondes peuvent se définir à un premier niveau comme la présentation, à cette Marquise qui représente le public non spécialiste, d’un objet scientifique. Cet objet c’est le Cosmos copernicien. La nature de cet objet est elle-même mixte : c’est un système spéculatif, que les observations de Galilée ont en partie confirmé. Il relève ainsi à la fois du pensable et du visible, tout en prétendant à la réalité.

C’est ce qui s’exprime dans l’annonce solennelle que fait le philosophe à la Marquise au premier soir : « je crois que je n’ai qu’à tirer le rideau, et à vous montrer le monde » [7]. Le motif du lever de rideau symbolise le fait que ce monde à la fois n’est pas immédiatement perceptible (discontinuité), et constitue pourtant la réalité de ce qu’on voit (suture). L’univers ne se propose pas comme autre monde, mais comme étant en continuité avec notre point de vue actuel, soit celui des deux personnages observant le ciel nocturne depuis le Parc. Le cosmos n’est pas autre chose que ce que l’on voit, simplement on ne le voit pas immédiatement tel qu’il est, depuis le point de vue où l’on se trouve. C’est ce que suggère l’image de l’Opéra : « je me figure toujours que la nature est un grand spectacle qui ressemble à celui de l’Opéra. Du lieu où vous êtes à l’Opéra, vous ne voyez pas le théâtre tout à fait comme il est » [8]. L’objet du premier soir est d’établir une continuité. D’un côté il faut partir de ce qu’on voit et le dépasser pour concevoir le système du monde ; de l’autre, il faut que l’on puisse expliquer, à partir de ce système, notre point de vue erroné sur lui.

Le philosophe retrace le parcours de cette double démarche. Il procède d’abord à une brève histoire de la cosmologie, depuis les observations des Chaldéens jusqu’aux différents systèmes de monde, du cosmos géocentrique au système de Copernic. Ce dernier est ensuite envisagé dans le détail, du point de vue de sa cohérence interne. Et le philosophe montre aussi comment l’on peut dériver à partir de lui notre point de vue perceptif, ainsi que les erreurs d’interprétation elles-mêmes. Au fil de cette présentation, une double configuration se dessine. Dans l’une le point d’observation est fixe ; c’est le point de vue de l’observateur depuis la Terre - « de la Terre où nous sommes » on voit des étoiles fixes, et des planètes qui « se regardent diversement, et figurent diversement ensemble » [9]. L’autre, c’est le point de vue de la Terre elle-même, configuration où tout est en mouvement – « Nous marchons, et les autres planètes marchent aussi, mais plus ou moins vite que nous ; cela nous met dans différents points de vue à leur égard » [10]. L’enjeu du dialogue, c’est d’opérer le passage du changement au mouvement ; d’une configuration où le point de vue est origine et fixe, à une autre où il est relatif et mobile.
Au terme du premier soir, le système copernicien a été exposé et validé ; il existe à titre de représentation, qui n’est pas intégrée à la réalité perceptive, tout en étant compatible avec elle. La continuité est assurée au niveau logique et théorique ; mais le nouveau cosmos reste un espace abstrait.

L’idée du voyage des planètes, présenté par la Marquise comme expérimentation des différents points de vue, s’offre alors comme solution permettant de combler d’une continuité imaginaire l’écart qui demeure entre l’espace orienté du parc et la représentation mentale du système solaire : « Eh bien, dit-elle, faisons le voyage des planètes comme nous pourrons, qui nous empêche ? Allons nous placer dans tous ces différents point de vue, et de là considérons l’univers » [11]. Ce procédé permettra de passer d’une perspective sur l’espace à un espace perspectif.

Ce voyage occupe la majeure partie du dialogue. Chaque étape permet d’évoquer les caractéristiques physiques des planètes, leur taille, la distance des unes aux autres, la durée de leur révolution, etc. Mais surtout, chaque étape permet d’imaginer et de décrire le panorama qu’a chacune des planètes sur le reste de l’univers. Les deux personnages font ainsi l’expérience successive des différents points de vue, et ils actualisent dans l’espace imaginaire les différentes perspectives. Ce qui s’opère ainsi, c’est la construction, dans le texte, de cet espace à trois dimensions, doté d’une profondeur, qu’est l’espace de la physique. Ici se rencontrent l’espace de la poétique et la géométrie dans l’espace.

S’ajoutant au simple voyage, l’hypothèse des mondes habités et les images qu’elle suscite viennent animer, concrétiser cet espace en trois dimensions. Les points de vue ne sont plus seulement des points géométriques, dont on peut faire l’expérience imaginaire : ils deviennent des regards. Cela introduit des rapports de réciprocité qui épaississent encore la texture de cet espace. Et tout se passe comme si ce jeu des regards, cette « curiosité mutuelle avec laquelle les planètes s’entre-considèrent » [12] comme dit la Marquise, venait doubler les rapports de projection et de réfraction qui définissaient déjà les jeux physiques de la lumière, ces « longues et vastes traînées de lumières qui se croisent, se traversent, et s’entrelacent de mille façons différentes, et forment d’admirables tissus » [13]. La personnification des planètes, qui sont évoquées comme dotées d’intentions, de percepts et d’affects, personnification qui égaye l’objet scientifique, se trouve en quelque sorte justifiée par l’hypothèse des mondes habités – elle ne relève plus alors de la personnification, mais de la synecdoque. La conception physique d’un univers en équilibre, formé d’entités individuelles multiples et de même nature, est illustrée par l’image de l’équilibre diplomatique entre des entités nationales. Enfin, l’analogie de la navigation maritime intègre les caractéristiques d’un univers plein dans lequel les planètes flottent dans une matière céleste fluide, tout en esquissant la promesse d’une prochaine communication interplanétaire.

L’univers qui est ainsi présenté se caractérise par sa commensurabilité. S’il s’étend à l’infini, cet infini est fabriqué par réduplication. Toutes les planètes sont des Terres, chaque planète est un tourbillon, lui-même pris dans le tourbillon du soleil, qui est à son tour multiplié par le nombre infini d’étoiles fixes. Les points de vue sur cet infini sont infiniment variés, mais ils se valent ; et l’objet du point de vue, l’univers infini, est certes en mouvement, mais il est constant dans son identité. Comme dit la Marquise, la Nature « s’est épargnée la peine de changer les objets pour chaque point de vue » [14].

On a donc bien dans les Entretiens la présentation d’un objet scientifique, et la construction poétique, par les procédés de l’analogie, de la projection et de la réduplication du point de vue, d’une continuité entre notre expérience actuelle et cette réalité spéculative.
Cet idéal d’intégration se laisse d’ailleurs bien lire dans la formule que le philosophe utilise au cinquième soir pour résumer le trajet accompli. « Il me suffit d’avoir mené votre esprit aussi loin que vont vos yeux » [15] dit-il à la Marquise, bouclant ainsi la boucle.

Mais tout n’est pas si simple. Car si d’une part, la science vise l’unification du réel, et si le dialogue tente d’opérer cette unification - inscrire notre point de vue dans la pluralité continue de l’espace physique-, d’autre part, les caractéristiques mêmes de cet objet scientifique - prétendant à la réalité physique, tout en étant partiellement invisible pour nous-, impliquent une mise en perspective du réel lui-même, soit sa possibilisation. Pour que la Marquise admette une réalité qui va contre les évidences sensibles et les idées reçues, il faut qu’elle admette la possibilité du possible lui-même, de l’incertain, de l’inconnu.

Toute une part du dialogue est ainsi consacrée à la déclinaison du thème des limites des facultés et des connaissances humaines et des difficultés subséquentes du jugement. Les limites des sens sont ainsi régulièrement affirmées, limites qui déterminent à leur tour celles de l’imagination, puisque celle-ci « ne peut aller plus loin que les yeux » [16]. L’expérience visuelle dicte des préjugés qui empêchent de recevoir les vérités nouvelles qui les contredisent, et l’imagination n’est pas capable de créer du nouveau [17] . L’amour-propre est une autre limite, source de nombreuses erreurs de perspective : illusion orgueilleuse que l’homme est au centre de tout et que la nature a tout destiné à son usage. Limites encore de la raison, qui est aveuglée par les évidences sensibles et les passions [18] est particulièrement intéressant. Le soi-disant décor galant des Entretiens en devient soudain moins décoratif, tout en exposant en retour les limites d’un discours philosophique qui se proclame neutre et universel.]]. La conséquence de ces limites, c’est que l’homme ne peut plus servir de commune mesure. Le philosophe remarque par exemple à propos du temps : « Devons-nous établir notre durée, qui n’est que d’un instant, pour la mesure de quelque autre ? » [19]. L’homme n’est plus la mesure de toute chose, et il y a incommensurabilité de l’homme et de l’univers. Fontenelle articule ici les pièces d’un discours sur l’homme emprunté à la pensée morale et sceptique qui ponctue tout le siècle avec des arguments relativistes issus des découvertes de la nouvelle science.

Si les sources des différents arguments sont multiples, un détour par le Pascal des Pensées nous permettra d’éclairer la spécificité de leur configuration. En effet, les Entretiens nous apparaissent comme une reprise et un renversement du dispositif pascalien [20] . Fontenelle reprend la scénographie pascalienne, tout en la coupant du projet apologétique, et en la mettant – réponse de la bergère à l’habile - au service de sa pédagogie du relatif. Le gain de l’opération de détournement est double et l’ironie portée au carré : car non seulement Fontenelle reprend l’Homme là où Pascal l’avait laissé, prostré au bord de l’abîme, et lui tend la main pour l’initier aux joies du vertige et lui apprendre à tourner - non sans l’avoir au passage transformé en femme, dans une philosophie de l’autonomie qui se pratique sans majuscule -, mais il se sert encore du fait que c’est Pascal qui a fort imprudemment synthétisé le discours de l’incroyant et lié officiellement l’univers infini de la nouvelle science au relativisme moral et religieux, pour se dégager, par effet de citation, d’une accusation éventuelle de libertinage. Le fait que la présence de Pascal soit évidente tout en n’étant jamais accréditée crée une tache aveugle dans le texte qui constitue à la fois la meilleure des armes et le meilleur des boucliers.

Ce qui constitue le facteur d’unité du florilège relativiste des Entretiens, c’est la question du point de vue. Au deuxième soir, le philosophe répond à la Marquise qui peine à voir la Terre comme une planète : « Nous voulons juger de tout, et nous sommes toujours dans un mauvais point de vue. Nous voulons juger de nous, nous en sommes trop près ; nous voulons juger des autres, nous en sommes trop loin. Qui serait entre la Lune et la Terre, ce serait la vraie place pour bien voir. Il faudrait être simplement spectateur du monde, et non pas habitant » [21]. On retrouve la même idée chez Pascal : « Il n’y a qu’un point indivisible qui soit le véritable lieu : les autres sont trop près, trop loin, trop haut, trop bas. La perspective l’assigne dans l’art de la peinture. Mais, dans la vérité et dans la morale, qui l’assignera ? » (Pensées, 85, 1112 ; La. 58). Mais alors que Pascal utilise le point de vue optique comme une métaphore, et met en parallèle des domaines - la peinture d’un côté, la vérité et la morale de l’autre - distincts, Fontenelle glisse sans transition du domaine de la morale au domaine de la physique. Ce glissement témoigne de la complexité, dans les Entretiens, du rapport de la topique morale au domaine de la physique. Si le thème moral se présente souvent à la manière musicale d’un contrepoint (maxime), et s’il semble donc formellement indépendant ou du moins isolable, ce que permet à Fontenelle l’usage de la parataxe, c’est de tramer en fait un rapport dont la nature est tour à tour illustrative, analogique, et généalogique, et la fonction, métaphorique, homologique, et causale. Pour revenir à notre exemple, la question de la « vraie place », épineuse question du jugement, semble résolue sans difficulté par la géométrie — « Qui serait entre la Lune et la Terre, ce serait la vraie place pour bien voir », dans ce qui peut apparaître comme une extension abusive de la métaphore. Mais ce brouillage est calculé : il permet que la formule qui suit, et qui met en question la possibilité même de la position de spectateur — « il faudrait être simplement spectateur du monde et non pas habitant » — opère un minage souterrain à longue portée. Ce que rend possible en effet le glissement implicite d’un domaine à l’autre, c’est que ses implications potentielles soient à la fois éthique — elle pointe la nature fictive de toute posture d’extériorité, qu’elle soit retrait ou surplomb — philosophique – elle questionne la légitimité même d’un discours de vérité universaliste — et scientifique — elle interroge également la nature de l’objectivité scientifique. On voit à travers cet exemple comment le point de vue, dans les Entretiens sur la pluralité des mondes, apparaît à la fois comme l’outil même de transversalité, utilisé pour sa polysémie et sa plasticité, et comme la question philosophique nodale. Ce qu’implique ce passage, court-circuitant la tonalité déploratoire attachée par Pascal à l’absence du « véritable lieu », c’est que toute vérité est en situation, et que donc un discours de vérité n’est recevable que s’il exhibe ses propres fondements, et - soit ? [22] — son lieu d’énonciation.
Dans les Entretiens, la reconnaissance et l’exposition du caractère relatif de l’homme, de son point de vue et de son monde, ne nourrissent pas une vision sceptique. Il ne s’agit pas non plus de confronter la Marquise à l’abîme sans médiation de l’infiniment grand et de l’infiniment petit. Au contraire, ces limites sont réinvesties dans un apprentissage de l’hypothèse comme mode, lequel permettra de retrouver l’infini, mais un infini cette fois du relatif lui-même.

JPEGL’hypothèse des mondes habités et les images auxquelles elle donne lieu pouvaient apparaître dans un premier temps comme ayant une fonction simplement illustrative, visant à animer et concrétiser le cosmos de la science et ses caractéristiques physiques. Et cet univers surpeuplé, tout bruissant de coquetteries mondaines et diplomatiques, est certes plus facile à apprivoiser que les silencieux espaces infinis de l’adversaire. Mais l’hypothèse, c’est aussi et avant tout un mode, lequel a ses règles propres et demande un apprentissage. L’introduction à l’hypothèse comme mode se fait en trois temps : au second soir, proposition par le philosophe de l’hypothèse de la Lune habitée ; au troisième soir, sa rétractation, puis, enfin, sa réhabilitation. Ce procédé a une fonction didactique : il vise à bien faire comprendre la disposition d’esprit particulière que requiert l’hypothèse ainsi que l’exigence qu’elle recèle. Cette disposition d’esprit est présentée à travers deux formules qui décrivent des techniques de pensée, contribuant à faire apparaître l’hypothèse comme une pratique. La première, « Je ne prends parti dans ces choses-là que comme on en prend dans les guerres civiles, où l’incertitude de ce qui peut arriver fait qu’on entretient toujours des intelligences dans le parti opposé » [23] évoque la disputatio pro et contra ; l’autre fait écho à l’epoque sceptique, telle qu’elle a pu être définie par quelqu’un comme La Mothe Le Vayer. Ainsi le philosophe, à propos des habitants de la Lune : « nous ne nous déterminerons ni pour eux, ni contre eux ». Ce à quoi la Marquise répond : « je ne suis point capable d’une si parfaite indétermination, j’ai besoin de croire » [24] Nous soulignons.. Les difficultés de la Marquise à accepter d’abord l’existence des habitants de la lune, et ensuite leur disparition, c’est-à-dire sa répugnance à renoncer aux deux modes de la certitude et de la croyance, illustrent à quel point l’hypothèse comme mode nécessite un lâcher-prise radical. Mais ce qui se révèle lorsque l’on accepte de « nager à l’aventure » [25], c’est que l’incertain et le possible sont les deux faces d’un même mode. Et ce qui s’offre alors, c’est l’espace illimité du possible, et sa fertilité infinie. Cela se manifeste dans la fameuse formule du « Pourquoi non », qui, comme l’admet joyeusement le philosophe, a « une vertu qui peuplera tout » [26].

Ouverture illimitée du possible, voilà qui peut sembler une formulation extrême. En effet, il y a des règles qui président à la formation de l’hypothèse des mondes habités, et qui donc la limitent. Elle repose ainsi sur le présupposé d’uniformité de la Nature et sur le principe d’analogie. Et l’on trouve dans le dialogue un certain nombre d’énoncés qui occupent la fonction de principes théoriques pour l’imagination des mondes. Mais à bien y regarder, ceux-ci sont très larges, et utilisés de manière plutôt souple, voire parfois apparemment contradictoire. On peut se demander par exemple quelle est l’articulation exacte du principe de similitude, exprimé entre autres au cinquième soir : « Vous convenez que quand deux choses sont semblables en tout ce qui me paraît, je les puis croire semblables en ce qui ne me paraît point, s’il n’y a rien d’ailleurs qui m’en empêche » [27] et de la règle de différence, qui intervient par exemple au troisième soir : « Vous croyez que les gens de la Lune doivent habiter sur la surface de leur planète, parce que nous habitons sur la surface de la nôtre : c’est tout le contraire, puisque nous habitons sur la surface de notre planète, ils pourraient bien n’habiter pas sur la surface de la leur. D’ici là il faut que toutes choses soient bien différentes » [28]. Ou encore, que devient la notion de corps solide, qui définit les planètes et leur égalité de nature, une fois dit que « Beaucoup de corps qui paraissent solides ne sont presque que des amas de ces animaux imperceptibles » [29] ?
PNG
Ces prétendus principes semblent être utilisés avec bien peu de rigueur théorique ; et les concepts sur lesquels ils se fondent semblent étrangement dissous par d’autres énoncés du texte. A quoi attribuer ce flottement ? Celui-ci n’est le signe ni d’une désinvolture du philosophe, ni de la faiblesse théorique d’un ouvrage de vulgarisation, mais bien l’exposition rigoureuse des implications du relativisme. Le fait que le monde de l’homme et ses ordres de grandeurs soit relatif, n’implique pas, comme dans la vision pascalienne, l’humiliation de toute pensée. Mais cela demande que soit identifié le sol sur lequel elle s’enlève, soit ses conditions et présupposés. L’expérience perspectiviste que le texte met en place, à la fois se construit sur, et exhibe, le présupposé suivant : à savoir que le monde de l’homme n’est plus, en droit, la seule et unique mesure, tout en étant, en fait, la seule mesure disponible ; et que les différences et les ressemblances ne sont pas fondées dans l’être, mais sont les deux faces, qui se déterminent réciproquement, de l’analogie, qui est quant à elle l’outil de base de toute pensée.

Il est naturel de vouloir donner plus de portée théorique aux énoncés qui se présentent dans le dialogue sous l’allure du raisonnement scientifique. Mais en fait, un énoncé tautologique, comme : « Ce qu’il y a de sûr, c’est que la nature ne saurait faire vivre les gens qu’où ils peuvent vivre » [30], qui expose la circularité inhérente à toute conjecture, a une égale importance dans le dispositif du texte. De même que cette autre proposition, tout aussi tautologique, qui suggère parfaitement que le réel n’est connaissable que comme système flottant de rapports et des proportions : « J’entends des fruits, des blés, des eaux à la manière de la Lune, que je fais profession de ne pas connaître, le tout proportionné aux besoins de ses habitants, que je ne connais pas non plus » [31]. Cet énoncé propose le contenu de l’hypothèse comme indéterminé et indéterminable, mais il expose une structure à la fois rationnelle et poétique, tout en produisant l’indétermination dans la rhétorique. Si ces énoncés constituent des non-lieux pour la logique ou pour la fiction, leur réitération d’une impossibilité de remplir l’hypothèse donne en effet un focus au possible, force à le maintenir ouvert – mode et non contenu. La création du possible comme lieu via l’indétermination est l’enjeu d’un certain nombre de figures rhétoriques utilisées dans les Entretiens, comme par exemple la contradiction, ou encore l’épanorthose. Le fait de revenir sur une idée ou une image pour la désavouer permet de créer comme un espace « en blanc », un fond de carte de l’inconnu [32].

Le texte joue avec humour de ces effets de circularité logique. Ainsi par exemple, à la fin du quatrième soir, après que les partenaires ont imaginé les caractéristiques des habitants de toutes les planètes, la Marquise remarque : « Tous les habitants de Mercure sont vifs, tous ceux de Saturne sont lents. Parmi nous les uns sont vifs, les autres lents ; cela ne viendrait-il point de ce que notre Terre étant justement au milieu des autres mondes, nous participons des extrémités ? Il n’y a point pour les hommes de caractère fixe et déterminé ; les uns sont faits comme les habitants de Mercure, les autres comme ceux de Saturne, et nous sommes un mélange de toutes les espèces qui se trouvent dans les autres planètes » A quoi le philosophe répond : « J’aime assez cette idée (…) nous formons un assemblage si bizarre, qu’on pourrait croire que nous serions ramassés de plusieurs mondes différents ? A ce compte il est assez commode d’être ici, on y voit tous les autres mondes en abrégé » [33].

Cette comparaison où ce sont les habitants des mondes, imaginés à partir de l’homme, qui viennent à leur tour servir de comparant fait faire à la pensée un saut : on se retrouve soudain à l’autre bout de la lunette analogique. Cependant, ce passage n’apparaît comme un cercle vicieux que si l’on cherche à établir un système de vérité absolu. Car accepter le relatif, c’est accepter que l’on soit toujours déjà pris dans un looping analogique. Et la cohérence propre au relatif, système flottant de relations, c’est bien, comme le suggère finalement sérieusement le passage, une logique du composite.

Si l’analogie peut poser problème à une pensée de l’absolu, elle est l’outil privilégié et libérateur d’une pensée du relatif. Ce qui est en jeu dans la multiplication des analogies que le philosophe propose à la Marquise, et ce qui s’effectue au fil de celle-ci, c’est la réinscription de l’homme dans une série en variation continue. C’est tout le thème de la diversité qui intervient ici, et qui s’exprime par exemple dans l’analogie des espèces et des visages. Chaque visage est particulier, et cette « variété infinie » [34] est en même temps prise dans une continuité [35]. Selon le point de vue où l’on se place, tout peut être à la fois centre d’un monde et élément d’une série. Une feuille d’arbre est un « petit monde » pour le vermisseau, et chaque grain de sable est potentiellement un univers ; chaque homme, encore, a un point de vue singulier sur le monde. Ce que dit le philosophe au cinquième soir à propos des soleils peut servir ici de formule générale : si « dans leur monde ils sont uniques en leur espèce, partout ailleurs ils ne servent qu’à faire nombre » [36], nous soulignons.. Tout est potentiellement à la fois monde, et matériau de monde. On considère en général l’analogie comme mise en rapport de réalités préexistantes, mais elle peut aussi bien être décrite comme établissement d’une polarité dans du continu. L’analogie, qui est à la fois ce qui sépare et ce qui relie, constitue ainsi l’interface de ces différents points de vue. La conséquence est qu’il n’y a plus de place pour la nostalgie d’un « point indivisible », qui serait le « vrai lieu » — ce point dont l’absence signait chez Pascal la misère de l’homme. L’homme lui-même est tantôt une unité, tantôt cet « assemblage si bizarre » d’éléments, éléments qui peuvent être dispersés, recombinés, pour composer d’autres mélanges.

Si, comme on l’a dit, le dialogue ne cesse de réitérer en contrepoint les limites que la vue impose à l’imagination comme à la raison, au cinquième soir, une « espèce de perspective si longue, que la vue n’en peut attraper le bout » [37] s’ouvre devant la Marquise. De quoi est faite cette perspective ? Un peu plus tôt, au troisième soir, la Marquise remarquait : « mon imagination est accablée de la multitude infinie des habitants de toutes ces planètes, et embarrassée de la diversité qu’il faut établir entre eux ». Ce à quoi le philosophe répondait : « On peut seulement apercevoir d’une certaine vue universelle la diversité que la nature doit avoir mise entre tous ces mondes » [38]. Cette formule, dans son approximation, semble vouloir désigner quelque chose qui ne serait ni une représentation, ni une abstraction ; ni une image ni un concept ; mais peut-être bien, justement, cet horizon que constitue la variation. Les notions de variation et d’horizon semblent bien convenir à un texte qui non seulement refuse mais combat l’abstraction conceptuelle. Si l’on examine les grands couples conceptuels utilisés dans les Entretiens, par exemple raison et imagination, on s’aperçoit qu’ils sont utilisés comme une polarisation, tout en étant vidés de leur contenu philosophique. Soit les concepts sont utilisés dans d’autres passages dans un sens trivial, soit ils sont déclinés en adjectifs, adverbes, etc. Tout au long du texte se déploie une technique de l’approximation qui passe à la fois par l’emploi d’un vocabulaire – voir l’omniprésence du mot « presque » - et une poétique de la dispersion lexicale, et de la création de nébuleuses notionnelles. Si Fontenelle exprime ailleurs le souci d’imprimer à la raison « le pli du vrai » [39], ce projet philosophique est inséparable d’une poétique du « tissu (…) ondoyant » [40]

La variation et l’analogie sont ce qui permet d’ouvrir un « champ » [41], de donner un « plan » [42] à l’imagination. Méthode de perception, elles s’affirment également comme méthode de création. A Pascal qui soulignait les bornes de l’imagination humaine et son incommensurabilité à la fécondité de la nature, le philosophe réplique par une technique de la combinaison et de la transposition qui utilise le fini pour créer à l’infini ; permettant ainsi à l’homme d’imiter la nature non certes dans sa productivité mais dans son processus de production. C’est la leçon de la fable des abeilles, ainsi énoncée : « en transportant seulement sur d’autres planètes des choses qui se passent sur la nôtre, nous imaginerions des bizarreries qui paraîtraient extravagantes, et seraient cependant fort réelles, et nous en imaginerions sans fin » [43].

Enfin, ce principe de variation, combinaison et transposition est aussi celui du texte lui-même, présenté dès la préface comme « ce composé si bizarre » [44], et qui fonctionne en effet par superposition feuilletée d’éléments hétérogènes, variation thématique et « transport » de ces éléments d’un niveau et d’un domaine à l’autre.

Les Entretiens sur la pluralité des mondes ne se limitent ainsi ni à une représentation et une explication du nouveau cosmos, ni à une fiction des mondes habités. De manière bien plus complexe, le texte à la fois analyse, construit, et constitue, un espace pluraliste.

Les Entretiens exposent la circularité qui est au fondement de toute pensée et de tout discours sur le monde. En même temps, il libèrent l’analogie, et entraînent la pensée dans un « mouvement perpétuel » de va-et-vient infini, qui est aussi bien la danse du relatif ; et qui ne correspond pas à la perception statique du réel, mais en reproduit la consistance dynamique. L’hypothèse des mondes habités permet de superposer à l’incommensurabilité de l’homme et de l’univers la variation continue des différences et des ressemblances ; elle permet de substituer à l’expérience des limites comme vertige paralysant de l’incommensurabilité absolue – comme chez Pascal -, l’expérience des limites comme vertige voluptueux d’une incommensurabilité relative, qui se définit aussi comme expérience des seuils.

JPEG
"Non seulement vous oserez tourner, mais « vous tournerez avec plaisir » [45], promet le philosophe à la Marquise au début des Entretiens. A lire l’enthousiasme de celle-ci, qui culmine dans un résolu : « donnons-nous aux tourbillons » [46], il semble que la promesse soit tenue.
C’est en effet à une expérience du plaisir que nous convient les Entretiens sur la pluralité des mondes. D’abord le plaisir, revendiqué dès le début du texte, du spectacle, le merveilleux spectacle de la nature. Spectacle grandiose du nouvel univers, qui s’étend à l’infini ; ballet majestueux des planètes. Spectacle, aussi, d’un réel retrouvé sous un point de vue neuf, plein de surprises et de mondes. C’est ensuite le plaisir du vertige de l’analogie, le parcours sans fin des degrés de différences et des degrés de similitudes, et les sauts d’un point de vue à l’autre, dans une mise en mouvement infinie de la pensée qui vient compenser l’immobilité du corps. Plaisir, encore, du pur devenir et de la perte de soi, par exemple lorsque la pensée s’essaie à penser ce qui la nie – comme le point de vue de Jupiter [47], ou se confond soudain dans la multitude - ainsi la Marquise remarque-t-elle à propos des habitants des planètes des autres tourbillons : « ne sont-ils pas presque anéantis par l’expression même dont vous êtes obligés de vous servir en parlant d’eux ? Il faut que vous les appeliez les habitants d’une des planètes de l’un de ces tourbillons dont le nombre est infini. Nous-mêmes, à qui la même expression convient, avouez que vous ne sauriez presque plus nous démêler au milieu de tant de mondes » [48] .

Livre de philosophie, les Entretiens sur la pluralité des mondes explorent la question du point de vue : qu’est-ce qu’un point de vue ? Depuis quel point de vue quelque chose se distingue et apparaît ? Quelles sont, enfin, les conditions de la naissance d’un être, c’est-à-dire d’un sens, à la croisée du corps, de l’image et du langage ?
Expérience de pensée, les Entretiens offrent à celle-ci le plaisir non seulement de voir le spectacle de l’univers, mais encore de respirer à son rythme, c’est-à-dire « avec plus de liberté », dans une expérimentation du point de vue transversale aux facultés et aux catégories, et qui n’ignore rien des plaisirs transitoires de l’émergence et de l’anéantissement.
C’est ainsi que fonctionne la machine perspectiviste, nous emportant [49] dans le manège de l’immanence et de l’infini.
JPEG

Notes

[1* Les Entretiens sur la pluralité des mondes, éd. Christophe Martin, Paris, Flammarion, « GF », 1998. Soir 5, p.142

[2* Les Entretiens sur la pluralité des mondes, éd. Christophe Martin, Paris, Flammarion, « GF », 1998. Soir 5, p.142

[3Op. cit., p. 50.

[4S 5, p. 157

[5S5, p. 156.

[6S1, p. 76.

[7S1, 65.

[8S1, p. 62.

[9S1, p. 65.

[10S1, p. 74.

[11S3, p. 110.

[12S4, p. 134.

[13S4, p. 125.

[14S3, p.106-7.

[15S5, p.157.

[16S3, p.114.

[17Le thème de l’imagination et de ses limites dans les Entretiens demanderait à être réinscrit dans sa complexe intertextualité, puisqu’il emprunte son argumentaire à des auteurs aussi différents que Descartes, Malebranche, Cyrano, ou Gassendi et Bernier. Nous renvoyons pour cela aux rigoureuses études d’Alain Niderst — Fontenelle à la recherche de lui-même, Paris, A.-G. Nizet, 1972 — et de Raoul Carré — La Philosophie de Fontenelle ou le sourire de la raison, Paris, Alcan, 1932. Mais la recherche des sources ne doit pas faire oublier que cet art du collage s’inscrit d’une manière selon nous très concertée dans une exploration des lignes de fractures du discours conceptuel et systématique. Or la notion d’imagination au XVIIe est bien l’un de ces lieux polyphoniques — à ce sujet voir Pierre Ronzaud, « Un labyrinthe inimaginable », In Ronzeaud, Pierre (dir.), L’Imagination au XVIIe siècle, Toulouse : SLC. Société de littératures classiques, 2002 (Littératures Classiques, n. 45).

[18Notons que la conception philosophique d’un Univers propter nos est réinscrite par Fontenelle non seulement dans une critique des passions – les illusions de l’amour-propre – mais dans une généalogie psychologique des idées spéculatives. A ce titre, le passage dans lequel le philosophe remarque finement que le « cœur » des philosophes « ne laisse pas de s’intéresser » aux affaires « de pure spéculation »[[ s1, 72

[19S5, p.155.

[20Notre lecture rejoint ici celle de Claudine Pouloin, qui met en lumière le même phénomène de reprise et de renversement de l’argumentation et du projet pascaliens dans la Préface à l’utilité des mathématiques.

[21S2, p. 84.

[22Tout le génie de Fontenelle consiste à laisser cette question ouverte.

[23S2, pp. 81-2.

[24S3, p. 102.

[25S1, p. 76.

[26La Marquise : « en disant toujours Pourquoi non ? vous m’allez mettre des habitants sur toutes les planètes ? » Le philosophe : « n’en doutez pas, (…) ce pourquoi non ? a une vertu qui peuplera tout » S3, pp.111-112.

[27S5, p. 145.

[28S3, p. 109.

[29S3, p.112.

[30S4, p.124.

[31S3, p.104.

[32Ce fond de carte de l’inconnu est selon nous l’exact équivalent, dans la catégorie de l’espace, de ce que fait Fontenelle avec la notion de progrès dans la catégorie du temps. Il s’agit pour lui de construire les coordonnées de la modernité et cela passe par la mise en place d’un horizon, spatial et temporel.

[33S4, p. 138. Ce final « abrégé de monde » suggère avec la discrète ironie habituelle une généalogie possible de la pensée du microcosme.

[34S1, p. 77.

[35« Je vois passer sous mes yeux tous ces visages différents (…) enfin toute cette variété infinie qui est sur la surface de la Terre », S1, p. 76-77 ; « Nous ne sommes dans l’univers que comme une petite famille, dont tous les visages se ressemblent », S3, p. 115.

[36S5, p. 147

[37S5, p. 143.

[38S3, p.114, nous soulignons.

[39Préface sur l’utilité des mathématiques et de la physique, Œuvres Complètes, Paris, Fayard, 1994. TVI, p. 43.

[40Réflexions sur la poétique, fragment 23, OC, 1989. TIII, p. 130.

[41« Vous ai-je ouvert un assez grand champ à exercer votre imagination ? » demande le philosophe. S3, p. 116.

[42« Mon imagination travaille sur le plan que vous m’avez donné » dit la Marquise. S3, p. 118.

[43S3, p. 116, nous soulignons.

[44Préface, p. 53.

[45S1, p. 76.

[46S4, p. 128.

[47« Quand on verrait notre Terre de dedans Jupiter, quand on l’y connaîtrait, notre Terre ce n’est pas nous ; on n’a pas le moindre soupçon qu’elle puisse être habitée » S4, p.134.

[4847-S5, p.143.

[49ad libitum