mardi 28 octobre 2014

Accueil > Voir, Lire & écrire > Lire & écrire > Vacuum, plein de vide

Vacuum, plein de vide

, Hervé Bernard

En vain, cet homme se raccroche aux bouts de ficelles pour ne pas s’effondrer.
3 images, 3 moments de l’invention du marché

Vacuum plein de vide

La première, le Changeur et sa femme (Quentin Metsys) présente un homme et sa femme affairés à une table. Cette image représente l’invention de la lettre de change. Le cadre de l’image, comme celui du marché sont posés, clairs et compréhensibles.

Le Changeur et sa femme

La seconde, Le banquier et sa femme (image extraite d’une mise en image de la Spirale d’Italo Calvino par Hervé Bernard) affiche ce même couple traversé par des sentiments contradictoires, la circulation de la marchandise est à la fois plus fluide et moins contrôlable. Elle figure la libre circulation de la marchandise suite à l’invention des moyens de transport mécanique et propulsé par la vapeur, le moteur à explosion puis, plus tard, l’énergie nucléaire... Cependant, le banquier et sa femme conservent le sentiment d’un lien aux autres. L’image avec ses fuyantes contradictoires, celles des rails et de l’eau, comme le marché tendent vers un infini insaisissable.

Le banquier et sa femme

La dernière, une image d’Alain Nahum, présente un homme atterré, il vient de découvrir le négoce du vide invisible et de l’invisible vide. Non seulement il ne reçoit plus de contreparties à ce qu’il donne, mais la société, elle aussi, ne reçoit aucune contrepartie. La logique de la financiarisation aboutie emboutit l’homme. Certes le réel est réducteur mais l’absence de réel est dévastatrice. Elle rend autiste. Comment penser le sensible sans échange et sans réel ?

En vain, cet homme se raccroche aux bouts de ficelles pour ne pas s’effondrer. Contrairement à ce qu’affirme Lana Newstrom, l’artiste qui a vendu du vide dans une galerie de Londres, il lui est impossible d’interagir avec le vide, son imagination ne s’appuie sur aucun tremplin, tout comme ce cadrage, elle s’effondre. Ici, la multiplication des cadres, contrairement à de nombreuses autres images ayant recours à ce procédé (cf la photo de Willy Ronis réalisée avec le peintre André Lhotte à Gordes...), accentue ce sentiment d’une chute sans retenue. Tout ne tiens plus qu’à un fil.