vendredi 26 septembre 2014

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Les « Littoralités » provençales de Yannick Vigouroux

Du paradigme et du vernaculaire du cabanon

, Yannick Vigouroux

Ces photographies de repérage ont été réalisées en avril 2014 dans le cadre de ma résidence à La Chambre claire de Marseille : il s’agissait de trouver des sites intéressants et accessibles, qui puissent accueillir un sténopé-container avec lequel je pourrais réaliser des prises de vue en octobre prochain. Elles sont aussi une fin en soi, le prolongement de ma réflexion et recherche plastique sur le littoral et la question du vernaculaire en bord de mer. Au paradigme de la cabine de plage des côtes du nord et de l’ouest de la France envisagée, comme une possible camera obscura, s’est substitué dans ces images celui du cabanon, à l’origine habitation populaire de pêcheurs... 

La baie des singes, Marseille, avril 2014

«  Il était plus de minuit quand j’arrivai chez moi. J’habitais en dehors de Marseille, Les Goudes. […] ma maison, c’est un cabanon. Comme presque toutes les maisons ici. Des briques, des planches, et quelques tuiles. Le mien était construit sur les rochers, au-dessus de la mer. Deux pièces. Une petite chambre et une grande salle à manger-cuisine, meublées simplement, de bric et de broc. Une succursale d’Emmaüs. Mon bateau était arrimé huit marches plus bas. Un bateau de pêcheur, un pointu, que j’avais acheté à Honorine, ma voisine.  » écrit Jean-Claude Izzo dans Total Khéops (1995).

Anse des Phocéens, Marseille, avril 2014 (Fuji Instax Wide)

Les adaptations cinématographiques et télévisuelles des romans de la trilogie Fabio Montale ont été en grande partie tournées aux Goudes et à Sormiou que je photographie.

L’Estaque, avril 2014 (Fuji Instax Wide)

La périphérie de Marseille est une constellation de communes qui recèle une multitude de minuscules calanques, aux noms aussi exotiques qu’évocateurs : « Anse des Phocéens » qui évoque le passé antique de la ville, « Baie des Singes »... Ses liens avec la pègre : dans ce registre, « Anse de la Fausse Monnaie » est mon préféré.

Anse des Phocéens, avril 2014 (Fuji Instax Wide)

« Niolon », « Sormiou », « Morgia » ont de belles consonances occitanes.

Marseille, avril 2014 (Fuji instax Wide)

Je souhaitais aussi revenir à l’Estaque, village de pêcheurs découvert un an auparavant, si cher à Robert Guédiguian, qui ne cesse de lui rendre hommage dans ses films. Son grand succès critique et public, Marius et Jeannette (1997) se déroule dans le quartier des Riaux. Derrière le grillage se dresse l’architecture élancée de l’aqueduc immortalisé par Paul Cézanne et d’autres peintres. J’apprends que dans ce bidonville, les habitants ont le tout à l’égout depuis seulement deux ans. Certes, l’on n’y meurt pas de faim. Mais ce n’est pas la vitrine du MUCEM.

Sormiou, avril 2014 (Fuji Instax Wide)

Puis, je me rends avec le train bleu à la plage de Carro, sur la commune de Martigues, au nord-ouest de Marseille. J’y découvre de vastes carrières de calcaire, un paysage cubiste et dépouillé, laborieusement découpé par l’homme. Un autre décor et point d’ancrage possible pour ma camera obscura...

Sormiou, avril 2014 (Fuji Instax Wide)

Voir en ligne : Le site de Yannick Vigouroux